Vacarme 29 / Contextes

critiques du jugement entretien avec Louis Joinet

1977. Foucault est invité par le Syndicat de la magistrature à Goutelas. La justice est alors celle de Peyrefitte et des années de plomb : la peine de mort n’est pas abolie, qui fait du judiciaire un pur attribut de la souveraineté. À Goutelas, ce n’est pourtant pas cette subordination au prince qui préoccupe Foucault, mais l’hypothèse inverse : la justice, fût-ce celle de Badinter, pourra-t-elle jamais devenir un contre-pouvoir ? Pour Louis Joinet, cofondateur du SM et interlocuteur de Foucault, la question n’a cessé de résonner, au fil d’une carrière paradoxale où il se sera obstiné à ne pas devenir juge. Il se la pose ici, comme on poursuit une discussion interrompue.

Nous republions, en annexe, l’intervention de Foucault.

Vous êtes l’un des fondateurs du Syndicat de la magistrature. Est-ce par ce biais que vous rencontrez Foucault ?

J’ai rencontré Foucault pour la première fois en 1970, avec mon épouse, à l’occasion de la création du Groupe d’Information sur les Prisons, le GIP. Nous nous sommes croisés par la suite au cours de débats ou dans d’autres réunions : dans le cadre, par exemple, de la revue Esprit, dont j’étais au comité de rédaction ; au Comité d’Action des Prisonniers, le CAP, fondé par Serge Livrozet ; au Groupe d’Information Santé, le GIS, qui, si mes souvenirs sont exacts, était une sorte de GIP de la psychiatrie ; ou dans la nébuleuse du Mouvement d’Action Judiciaire, le MAJ, qui regroupait des juristes de toutes professions et intervenait sur le volet juridique de la plupart des luttes de l’époque.

Disons que, dans un premier temps, ce sont l’effervescence et le décloisonnement de l’après-68 qui ont favorisé notre rencontre. Mais le Syndicat de la magistrature a joué par la suite un rôle déterminant. Il faut avoir en mémoire que la date de fondation du syndicat fait un peu illusion. Il a certes été créé en 1968, mais sans rapport direct avec mai : la décision en avait été prise en décembre 1967. En fait, pour certains de ses fondateurs, la création du SM a trouvé en partie ses racines dans la guerre d’Algérie. Pour ceux, comme moi, que la traversée de cette période avait profondément marqués, pour nous qui avions vu fonctionner là-bas la justice, les idéaux de Montesquieu enseignés à l’Ecole de la magistrature paraissaient complètement décalés. Ceci n’est probablement pas étranger à mon intérêt pour la pensée de Michel.

C’est-à-dire ?

Je crois que mon intérêt pour Foucault était alors celui d’un magistrat qui, dans son for intérieur, avait tendance à penser que juger les autres était un peu un métier contre nature. Pour ma part, je suis entré en magistrature, si l’on peut dire, sur le tard et tout à fait par hasard. Au retour de la guerre d’Algérie j’avais repris mon travail d’éducateur de rue dans le 18ème arrondissement. Je l’ai perdu peu après à la suite d’un différend d’ordre pédagogique. J’avais alors repris mes études de droit abandonnées dix ans auparavant, ce qui m’a amené, un soir, à présenter un exposé sur le rôle de la jeunesse dans l’évolution de la société, sujet idéal pour un éducateur. Le maître de conférences, qui était magistrat, m’a approché à la sortie en me disant : « Vous devriez entrer dans la magistrature. » Ma réponse : « Écoutez, vous tombez bien, je suis au chômage, dites-moi ce que je dois faire. » Il m’a obtenu une bourse, j’ai préparé le concours et j’ai été reçu. Voilà. S’il n’y avait pas eu cette opportunité à un moment où je cherchais du travail, jamais je n’aurais envisagé d’être juge. C’est sans doute ce qui explique - hasards de la vie ou prégnance de l’inconscient - qu’en quarante ans de carrière dans la magistrature, j’ai occupé pendant plus de vingt-trois ans des fonctions de juriste et non de juge. Je crois que je partageais avec Foucault, mais de l’intérieur, cette réticence fondamentale envers l’exorbitant pouvoir de juger.

Vous le côtoyiez également dans les séminaires du Syndicat de la magistrature à Goutelas, près de Lyon, où il fut quelquefois invité. Qu’attendiez-vous, et de ce séminaire, et de la présence de Foucault ?

Goutelas fut une sorte de retraite pour un grand nombre de mouvements de l’époque, notamment celui des paysans-travailleurs. Pour le SM, l’idée était au départ d’en faire un stage de formation syndicale. En ce qui me concerne, j’avais déjà pratiqué le syndicalisme, en tant qu’éducateur, avant de devenir juge. Mais la plupart de mes collègues étaient vierges en la matière, et pour cause : peu nombreux étaient ceux qui avaient exercé auparavant un métier, et surtout l’inconscient collectif du Palais a toujours poussé à croire que le syndicalisme était prohibé dans la profession, alors que cet interdit ne concerne que l’armée. Très rapidement, ces stages sont devenus un creuset de réflexion et d’échanges de vues, où nous nous efforcions de comprendre ce que nous faisions et où nous allions. J’avais par exemple demandé à Marin Karmitz, que je connaissais, de venir projeter Coup pour coup, le film qu’il a réalisé en 1971. On y voit comment des ouvriers du textile poussés à bout par les brimades et les cadences séquestrent leur patron. Il me semblait intéressant de montrer à des juges l’arrière du décor qui vaut à des ouvriers d’être déférés devant eux. Quant à Foucault, il a été invité deux fois, si ma mémoire est bonne, en 1973 et en 1977. Il ne venait pas nous faire la leçon, mais nous aider à prendre un certain recul, historique, critique, prospectif, sur nos propres pratiques. Personnellement, j’ai trouvé auprès de lui une manière de cultiver cette réticence dont je vous parlais envers la figure du juge, fût-ce celle du bon juge, qui tentait alors une partie de mes camarades.

Pouvez-vous en dire plus ?

La tentation était grande à l’époque, compte tenu de notre image de juges contestataires, de céder à une forme de foi en nous-mêmes, reposant sur le mythe du bon juge. Tentation compréhensible : nous sortions d’une magistrature quasi-napoléonienne - songez qu’à l’époque les juges étaient encore notés par les procureurs ! - et nous étions objectivement, par comparaison, des juges progressistes. Mais le souci légitime que le pouvoir n’interfère pas entre le juge et l’inculpé devient à mes yeux une déviance lorsqu’il se retourne, par exemple, contre les avocats. Dans un livre, le Syndicat critiquait sans nuance les avocats en ce qu’ils pouvaient faire écran entre le justiciable et la « bonne » justice que nous cherchions à rendre. Je n’étais pas d’accord. Il faut certes penser la justice comme un contre-pouvoir, mais il faut aussi et surtout qu’existent des contre-pouvoirs à la justice elle-même, ce qui est, par essence, le rôle fondamental de l’avocat.

C’est d’ailleurs l’un des points de résonance avec Foucault. À Goutelas, en 1977, il était venu commenter un livre collectif que le Parti socialiste avait inspiré en vue des législatives de 1978 sous le titre Liberté, libertés (voir pages suivantes). Robert Badinter, Michel Rocard, et d’autres y plaidaient pour ce que Foucault appelle « la démultiplication du rôle du magistrat ». Les auteurs proposaient de confier aux magistrats la tâche de faire contrepoids à une foule d’institutions ou de groupes potentiellement liberticides, de l’internement psychiatrique à la consommation, en passant par les expulsions et l’audiovisuel. On aurait pu sous-titrer le livre : « ou comment faire le bonheur des gens par le juge ».

Nous sommes en 1977 : cette « démultiplication du rôle du magistrat » dont Foucault croit trouver le symptôme dans Liberté, libertés et qui vous inquiétait à l’époque s’est-elle avérée par la suite ?

Pas vraiment. D’une part, quand la gauche est arrivée au pouvoir, Robert Badinter étant Garde des Sceaux, elle n’a pas mis des juges partout. Elle a d’abord pris la sage décision de supprimer les plus dangereux : tribunaux militaires, cour de sûreté de l’État. J’étais à cette époque en charge de ces dossiers au cabinet de Pierre Mauroy. D’autre part, l’hypothèse d’une croissance de ce que Foucault appelait le « judiciable » ne s’est que partiellement vérifiée. L’évolution la plus significative, en ce qui concerne la constitution de contre-pouvoirs institutionnels, s’est produite moins dans le champ judiciaire que dans le champ administratif. À partir de la fin des années soixante-dix, on a assisté en France, sur le modèle scandinave, à l’émergence de ce qu’on appelle désormais des « autorités administratives indépendantes ». J’ai eu la chance de présider la première : la Commission nationale informatique et libertés (CNIL). Toute une série d’autres ont vu le jour depuis : la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA), le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), l’Autorité de régulation des télécommunications (ART), etc. De quoi s’agit-il ? D’institutions chargées de missions de contrôle mais pas sur le mode judiciaire. Leur rôle n’est pas de juger, stricto sensu, mais de rendre transparentes les institutions et les groupes de pression. Leur méthode : le rapport, des avis rendus publics, des principes directeurs... Elles ne répriment pas mais conseillent ; elles ne sanctionnent pas, ou plus exactement leur sanction est la publicité. Il s’agit là, à mon sens, d’une évolution décisive dans l’histoire de ce judiciable qui interpellait Michel.

Est-ce à dire que la « judiciarisation de la société » n’a pas eu lieu, contrairement à ce qu’on entend partout ?

Il faut prendre garde, lorsqu’on parle de « judiciarisation », de ne pas confondre deux choses : la demande et l’offre de justice, autrement dit le contentieux et les juges. En fait, ce sont moins les lieux de pouvoir du juge qui s’étendent, que le contentieux qui augmente, sous l’effet de la capacité croissante d’organisation et d’intervention de la société civile. C’est particulièrement flagrant dans le domaine de la consommation : la prolifération du droit en la matière est liée de manière évidente au développement des associations de consommateurs, qui peuvent désormais se porter partie civile, au nom de l’intérêt général. Dans son intervention à Goutelas, Foucault évoque d’ailleurs la consommation comme l’un des nouveaux objets du judiciable. Mais il pose le problème d’en haut, si je puis dire, depuis le pouvoir, depuis l’offre institutionnelle, alors que les développements les plus importants, à mon sens, ont eu lieu en bas, du côté de la demande de justice, les citoyens ayant de plus en plus conscience et connaissance de leurs droits. Il s’agit moins d’une mutation qualitative que quantitative du judiciable.

Entre le contentieux et les juges, cependant, n’y a-t-il pas un troisième terme : le législateur ? Quand on songe à la loi Perben et à celles qui l’ont immédiatement précédées, on a le sentiment que « l’offre » judiciaire, depuis le milieu des années 1990, prolifère à nouveau : non plus au nom des libertés, comme en 1977, mais au nom de la sécurité.

C’est en effet une évolution notable, qui risque de marquer les autorités administratives indépendantes elles-mêmes. C’est tout l’enjeu, actuellement, du projet de loi qui va réformer la CNIL [1], projet contre lequel nous sommes plusieurs anciens membres à nous être élevés. La réforme envisagée va lui donner des pouvoirs quasi-juridictionnels, ce qui nous fait retomber dans le judiciaire. Pourquoi étais-je si attaché à cette institution, jusqu’à ne pas être toujours compris sur ce point ? Je me suis toujours opposé à ce qu’elle devienne un juge de plus. Que le juge, quand elle le saisit, fasse son travail - ce qui n’est hélas ! pas toujours le cas - mais elle ne doit pas être elle-même un juge de plus.

Cette judiciarisation de la CNIL est d’autant plus regrettable qu’en contrepartie elle va s’accompagner, pour les grosses entreprises, de mesures dérogatoires leur permettant d’échapper à son contrôle. Il est en effet envisagé de créer un « correspondant informatique » dans l’entreprise : une sorte de surveillant privé. Si l’entreprise s’en dote, elle ne sera plus obligée de déclarer ses fichiers à la commission. Problème : comme on ne prévoit pas de statut protégé pour cette personne, à l’instar d’un délégué syndical, il est fort peu probable que l’intéressé prenne le risque de s’opposer frontalement à son employeur en cas de non-respect de la loi. On perd donc sur les deux tableaux : la CNIL devient un juge supplémentaire, et sa juridiction a toute les chances d’être biaisée.

Et dans les institutions internationales, que vous connaissez bien, qu’en est-il des analyses de Foucault ? En particulier, qu’en est-il de ce mouvement de balancier entre contre-pouvoirs judiciaires et autorités administratives indépendantes ?

L’évolution historique est presque inverse. Il y a dans les instances internationales en charge des droits de l’homme, par exemple à l’ONU, une tradition de type ombudsman [2], sous la forme d’experts indépendants appelés « rapporteurs spéciaux ». C’est actuellement mon mandat onusien en Haïti. Il s’agit d’une mission d’enquête et de préconisation aboutissant à un rapport rendu public, pratique qui fait tout l’intérêt démocratique des autorités administratives indépendantes. C’est également ce que j’ai fait, dans le cadre d’un précédent mandat sur la détention arbitraire, dans de nombreuses prisons du monde, notamment en Chine et en Iran. Mais, pour reprendre les termes de notre discussion, on n’en assiste pas moins, depuis une quinzaine d’années, à une judiciarisation massive dans le champ international. Le judiciaire y gagne un terrain considérable de deux manières, soit par la création de juridictions pénales : la cour internationale, le tribunal pénal international sur l’ex-Yougoslavie, sur le Rwanda, sur la Sierra Leone, sur le Cambodge ; soit par le biais de la compétence universelle : procès Pinochet. Il y a même eu une tentative, à mon sens trop ambitieuse, ou prématurée, d’instauration d’une compétence extra-territoriale par la Belgique. Je regrette que nous ne puissions plus discuter de cela avec Foucault. Toutes ces initiatives étaient impensables à l’époque, notamment du fait de la guerre froide, alors qu’elles prennent une ampleur considérable.

Quels problèmes auriez-vous aimé lui soumettre ?

J’aurais notamment aimé poursuivre avec lui la discussion que nous avions à l’époque sur le coût du pouvoir. Dans son intervention à Goutelas, il met en lumière une transformation de l’exercice du pouvoir en Europe, qu’il date du XVIIIème siècle : un pouvoir qui se veut rationnel, désormais, doit s’économiser. Il a en tête le coût exorbitant de la répression et de la guerre pour le pouvoir lui-même, en ce qu’elles signifient la destruction des forces sur lesquelles ce dernier est assis - hommes, récoltes, biens, monnaie, etc. Or de cela, j’aurais aimé discuter depuis mon expérience internationale. Parce qu’autant le raisonnement m’apparaît valable en politique interne, autant sur le plan international, c’est trop souvent le contraire qui se produit. Prenez le tribunal pénal sur l’ex-Yougoslavie : le coût de fonctionnement d’une journée du tribunal est considérable, et pourtant il siège. Autre exemple : les forces de maintien de la paix du type FORPRONU : elles mobilisent, là encore, des sommes pharaoniques. Autre exemple, celui de la guerre en Irak. Selon les critères auxquels réfléchissait Foucault, on serait conduit à soutenir, dans ce cas, que la stratégie de pouvoir est trop coûteuse relativement à ses objectifs ; et pourtant, elle dure. Ce serait oublier - et l’Irak en est la démonstration flagrante - que l’exercice coûteux, politiquement et économiquement, du pouvoir, crée aussi des marchés incroyables. La destruction fait les plans Marshall. Cela aurait été passionnant d’en discuter avec Michel.

Depuis la lecture de Surveiller et punir, vous avez visité 143 prisons, partout dans le monde : les analyses de Foucault ont-elle résisté à la comparaison ?

Ce qui m’avait notamment frappé, dans Surveiller et punir, ce sont les développements sur l’architecture pénitentiaire. L’architecture des prisons n’est pas toujours ni partout panoptique, mais elle est toujours et partout un dispositif de pouvoir très allergique à la transparence envers son extérieur, donc aux contre-pouvoirs. Quand j’ai visité la prison d’Evine, un complexe pénitentiaire à Téhéran, j’avais auditionné d’anciens prisonniers en exil pendant près d’un an pour reconstituer les plans de la prison. Parce que la plupart du temps, quel que soit le pays, les autorités ne vous disent pas où sont les lieux que vous voudriez visiter et les gens que vous voudriez rencontrer, ou mentent sur leur identité : cela m’est arrivé en Argentine du temps de la dictature. Du coup, l’enjeu est de disposer d’un plan de la prison pour, tout à coup, bifurquer et aller voir ce que l’on tente de vous cacher. On peut aussi utiliser les photographies de presse. Quand un opposant est emprisonné, pour crier victoire, le gouvernement publie un article avec photo, ce qui nous permet de nous assurer que le détenu n’est pas un infiltré. Autre tactique : une fois qu’on a le plan, s’arranger pour le faire savoir. Vous avez les plans, les photos, rassemblés dans un classeur que vous consultez ostensiblement devant vos guides : c’est déstabilisant pour eux, parce qu’ils ne savent pas si vous en avez vingt, ou plus, ni si les plans sont complets ou non. Cela a un effet dissuasif : ils n’osent plus tricher.

Une belle histoire, très foucaldienne : quand un contre-pouvoir se constitue à partir du savoir des détenus...

Oui. La différence entre le GIP, le CAP ou le GIS, et des organisations comme Amnesty ou la Fédération internationale des droits de l’homme - dont le rôle est par ailleurs irremplaçable - c’est quelque chose comme la solidarité dans le vécu. Je ne sais pas comment vous dire cela. Ce n’est pas : « Moi, observateur des droits des détenus - ce qui est mon rôle, par exemple, à l’ONU - je réprouve ce que vous faites ». C’est plutôt : « Nous, dedans et dehors, allons faire savoir à tous ce qui se passe derrière les murs ». C’est plus impliqué, plus risqué aussi : courriers clandestins, manifestations sous les fenêtres, séjours au poste, etc. Ce qui compte, au fond, c’est que la politique soit progressivement assumée par les premiers concernés. C’est tout mon problème en Haïti. Mes propositions comme rapporteur spécial ne visent pas seulement à contribuer à la mise en place de structures veillant aux abus de pouvoir, mais également à permettre l’appropriation de ces structures par les Haïtiens eux-mêmes. L’expérience m’a enseigné qu’un dispositif même imparfait pris en charge par les gens eux-mêmes vaut mieux qu’une très belle architecture institutionnelle qu’ils ne s’approprieront jamais. Cela, c’est fondamental. Je crois que Michel ne m’aurait pas contredit.

Notes

[1Quelques jours après cet entretien est adoptée la nouvelle loi « Informatique et libertés », qui libéralise le fichage administratif généralisé, couvre les dérives des fichiers policiers et accorde à l’État tous les régimes dérogatoires sur les fichiers qu’il met en oeuvre. C’est Alex Türk, nouveau président de la CNIL, qui a été rapporteur du projet de loi au Sénat.

[2L’institution et le terme - littéralement, « celui qui parle au nom d’autrui » - sont d’origine suédoise. Typique de la social-démocratie scandinave, l’ombudsman était à l’origine un fonctionnaire indépendant, désigné par le parlement, auquel le citoyen pouvait s’adresser lorsqu’il contestait une position prise à son égard par une administration publique. Progressivement étendue à de multiples domaines institutionnels et importée par de nombreux pays - en France, dans les années 1970, avec la création du Médiateur de la République ou la CNIL - la notion désigne aujourd’hui des formes variées de contrôle du pouvoir, qui ont en commun d’être à la fois officielles (les ombudsmän sont mandatés), non-juridiques (s’ils peuvent être recrutés parmi les magistrats, ils ne jugent pas) et de procéder par investigation, recommandations et rapport public.