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Hénin-Beaumont : discriminations et mémoire ouvrière

Les 48 % de suffrages obtenus en juin 2009, à Hénin-Beaumont, par la liste emmenée par Steve Brillois et Marine le Pen, ont fait ressurgir une question insistante : comment le bassin minier, lieu historique de la gauche ouvrière, a-t-il pu devenir l’un des bastions du Front National ? Et comment expliquer que la xénophobie ait pu prospérer là où la mémoire locale souligne volontiers comment l’universalisme républicain et l’expérience de la mine auraient intégré harmonieusement les vagues successives d’immigration ? A ces questions, trois sociologues apportaient dès 2006 dans les colonnes de Vacarme, une réponse prenant à contrepied l’interprétation traditionnelle : déconstruisant le mythe selon lequel les immigrés maghrébins seraient, pour des raisons culturelles et éducatives, moins "intégrables" que leurs prédécesseurs polonais ou italiens, R.Epstein, T.Kirszbaum et P.Simon montraient comment ceux-ci sont victimes de discriminations actuelles, dans l’accès au travail comme aux leviers politiques locaux ; discriminations rendues invisibles précisément par l’importance d’une histoire ouvrière, supposée garante de l’intégration égalitaire de tous, et dispensant du coup de poser la question des inégalités raciales, voire d’en renvoyer la responsabilité aux victimes. On lira ici l’unique synthèse de cette recherche parue à l’époque (recherche dont le site Médiapart propose de son côté la lecture intégrale) ; l’occasion de revenir sur une série d’articles qui jettent une lumière différente sur les rapports entre inégalités sociales et raciales, fait populaire et expériences minoritaires.