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Vacarme n° 50 paraît

Le numéro 50 de la revue (janvier-avril 2010) vient de paraître. Cinq articles, signalés par un point vert dans le sommaire, sont consultables en ligne. Comme chaque trimestre, Vacarme cherche à éclairer l’actualité politique et culturelle en croisant les approches des sciences sociales, de la philosophie et de l’art. Vous y trouverez...

... un « Entretien d’ouverture » avec Jean-Christophe Bailly : « Tout passe, rien ne disparaît. »

Comment présenter Jean-Christophe Bailly ? Écrivain qui n’écrit pas de romans, philosophe qui ne se veut pas philosophe, historien qui ne goûte guère les chronologies et les ambiguïtés des « devoirs de mémoire », historien de l’art qui aime l’art dans l’instant, penseur politique (de la nature, de l’animalité, de la ville, du territoire) interrogeant la politique en retrait de tout pouvoir, romantique affirmé mais sans concession pour l’imagerie et le pathos : il est l’inassignable fait homme. Autodidacte et infiniment savant, militant actif dans sa jeunesse, puis auteur de pièces de théâtre, d’essais, de poèmes, d’une thèse de philosophie (Le champ mimétique), professeur à l’école du paysage de Blois, il reste insituable, toujours à côté de là où on l’attend. Mais résumer sa pensée à l’amour d’une multiplicité sans unité serait pourtant le manquer encore, car elle n’est pas sans fil rouges : c’est l’objet de cet entretien que de les découvrir.

... un « Chantier », dossier thématique d’une trentaine de pages : « Défendre la gratuité ». Il fera l’objet d’une conférence-rencontre au centre Georges Pompidou le 3 février 2010.

À la source de ce dossier, trois constats. Tout d’abord, la gratuité n’est plus à conquérir. Quinze ans après l’apparition du premier navigateur sur le web, la gratuité des échanges sur le net n’est plus une utopie ni un simple horizon, c’est un fait massif, irrépressible. Il s’agit moins dès lors de chercher à l’instituer que d’en inventorier les acquis pour mieux les défendre. La question croise des fronts anciens (l’école, la santé, l’accès à la lecture) et des formulations théoriques nouvelles (les travaux sur les Biens communs, récompensés par le dernier Nobel d’économie à travers la chercheuse Elinor Ostrom). Elle est aussi le lieu d’une profusion d’expérimentations : des expériences se sont accumulées, les expertises ont gagné en précision, des modèles économiques alternatifs se sont construits (licence globale, paiement au forfait, etc.).

Deuxième trait, le point fort de la gratuité, mais aussi son point faible, est d’être indexée à la notion de valeur. Car ce qui est gratuit est à la fois ce qui n’a pas de prix, ce que la société donne pour richesse inestimable, et ce qui est ou serait dénué de valeur, aux yeux des producteurs et des usagers eux-mêmes, enclins dès lors à en abuser ou à le dégrader. Cette ambivalence fait à la fois la force de la revendication politique de gratuité (celle de l’école, pour que nul ne soit privé d’instruction ; ou celle des musées, pour que le patrimoine culturel appartienne à tous) et l’obstination des sceptiques à remettre la question sans cesse sur le métier : la gratuité de l’école, par exemple, ne résout pas la question des inégalités scolaires, ni la gratuité des musées celle des inégalités d’accès à la culture « légitime ».

Troisième trait : les assises théoriques de la gratuité sont multiples et largement enchevêtrées. Trois modèles économiques et politiques au moins peuvent être distingués. La gratuité comme production d’une sphère non-marchande dans l’économie, conquise grâce à des financements socialisés : c’est le modèle de l’école publique, des bibliothèques, de l’hôpital — et la définition même des services publics. La gratuité comme refus des individus de se soumettre aux lois du marché : vol, piraterie, perruque, auto-réductions dans les supermarchés, mais aussi travail coopératif, développement de logiciels libres, bidouilles de hacker ou glanage, toutes formes qui s’insinuent dans les plis du capitalisme, s’y aménagent des espaces ou le minent de l’intérieur. La gratuité enfin comme pointe avancée du capitalisme, ou sophistication nouvelle des techniques de vente : des secteurs de vente entiers (presse, radios, moteurs de recherche) sont construits sur l’offre gratuite mais financés par la publicité ou les produits dérivés. Trois modes de production de la gratuité dont les divergences et les alliances dessinent probablement les lignes de clivage politiques à venir.

La gratuité, nouvelle frontière de la gauche ? C’est ce que tente d’explorer ce dossier, accompagné par les interventions graphiques de Vincent Perrottet, Myr Muratet & Anne Desrivières).

... un « Cahier » éclectique (musique, poésie, cartographie, etc.).

Ce trimestre, Emmanuel Burdeau ouvre une série d’articles sur la crise que traverse l’Action culturelle cinématographique et audiovisuelle ; Peter Frield détecte le secret de la modernité entre deux sites architecturaux : des Mayas au complexe immobilier d’Oscar Niemeyer à Brasilia ; Olivier Brossard a traduit de l’américain un extrait du Vrai sujet de Keith Waldrop ; Suzanne Doppelt & François Matton jouent en gris et en noir autour de l’herbe rouge ; Rodolphe Burger revient sur la double propension de la musique à jouer de la reprise et à la fuir ; Philippe Rekacewicz évoque sa manière de dessiner un espace cartographique ; Hubert Lucot continue de nous livrer des extraits de son prochain ouvrage avec Marseille, bonus, Obama ; et Victoire Patouillard nous propose un nouveau rébus.

... quatre « Lignes », série de feuilletons creusant les préoccupations politiques de la revue.

Claudio Lomnitz et Rafael Sanchez analyse le discours antisémite et homophobe qui traverse la logorrhée intarissable d’Hugo Chavez et de son entourage ; Antonin Sopena ouvre par le droit à la résistance une nouvelle ligne sur les droits fondamentaux ; pour amorcer la nouvelle ligne « l’Europe du pire », Sophie Wahnich met en perspective le retour de l’idéologie de l’identité nationale en Europe ; et pour conclure la ligne « fronts du sida », Gaëlle Krikorian montre comment la gouvernance de la santé par les indicateurs économiques met en concurrence les maladies et les programmes sanitaires.

Post-scriptum

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