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Vacarme 53 est en librairie

Le numéro 53, automne 2010, de Vacarme est disponible en librairie depuis le 26 octobre 2010. Le sommaire complet est également disponible. Parmi les 26 articles qui composent ce numéro, 9 sont d’ores et déjà librement accessibles (repérables grâce à un carré vert).

Comme chaque trimestre, Vacarme cherche à éclairer l’actualité politique et culturelle en croisant les approches des sciences sociales, de la philosophie et de l’art.

Entretien avec Avital Ronell

Le numéro s’ouvre par un long entretien avec Avital Ronell. Née à Prague, après une petite enfance en Israël, et une enfance dans un quartier d’immigration new-yorkais, Ronell est devenue spécialiste de littérature comparée en même temps que philosophe. Son œuvre et sa pensée jaillissent au détour d’un itinéraire institutionnel atypique. L’autorité académique ou politique est bien la première à faire les frais de sa démarche. L’affirmation spontanée de la maîtrise ou de la force souveraine ne peut en effet rien contre la condition même du savoir et du vouloir : le fait d’avoir été convoqué par ce que l’on ne voulait pas savoir. Répondant à l’appel, la philosophe rencontre les objets humbles qui secrètement font vaciller l’autonomie du sujet, mais trahissent ainsi son fond. Pour Ronell, tous les produits techniques nous deviennent ainsi nécessaires, non comme moyens d’autoconservation, mais plutôt comme appareils de jonction et de disjonction visant à incorporer l’autre. Pour la même raison, elle étudie la défaite orchestrée des guerres contre la drogue qui recourent à la maîtrise de soi et au contrôle politique. La politique sécuritaire, la conduite de guerres dites préventives, la dénégation du sida, tous ces thèmes sont retravaillés par une pensée qui a engagé une lutte sans merci contre les illusions de la souveraineté, au profit d’une épreuve de l’altérité. Dans cette exigence, se manifeste l’inquiétude éthique de l’œuvre d’Avital Ronell.

Chantier : conjuguer les temps de l’émancipation

Puis un dossier coordonné par Sophie Wahnich et Pierre Zaoui consacré à la conjugaison des temps de l’émancipation.

On ne convaincra jamais personne de s’émanciper, à commencer par soi-même, dans l’instant. L’aliénation a trop de ruses pour céder d’un seul coup. Il y faut au moins un suspens, un doute sur l’évidence du temps. Longtemps, la féodalité et son illusion d’une hiérarchie naturelle et d’un ordre immuable des castes et des privilèges sont apparues comme l’ennemi principal de l’émancipation. Mais il y a presque pire aujourd’hui : un certain grand récit libéral qui tue et désarticule les temps de l’émancipation avec une vigueur encore bien plus diabolique. Le présent, ce serait donc juste cette flaque étale, symptôme contemporain d’une crainte diffuse à investir le futur, symptôme d’une vie réduite à la survie. Walter Benjamin disait : « organiser le pessimisme », c’est-à-dire, dans la grande nuit du présent où le temps semble sans cesse jouer contre nous, refuser d’admettre que toute résistance est vaine. Nous avons voulu entendre ce mot d’ordre benjaminien ainsi :

1. Chercher d’abord à retrouver, à notre hauteur, la force inédite des Cahiers de doléances pré-révolutionnaires, c’est-à-dire ces formidables machines à métamorphoser les plaintes privées et disparates en revendications communes et publiques.

2. Rappeler ensuite sans relâche non seulement les désastres sociaux et culturels du court-termisme dominant, mais aussi ses propres impasses économiques, son impuissance perverse à assurer sa propre pérennité. Car si cette perversion se paye cher en termes de vies dégradées ou brisées, elle laisse aussi la porte ouverte à l’espérance d’un autre avenir.

3. Réapprendre ensuite à respirer l’air vif des utopies contre la longue histoire de leur délégitimation cynique. C’est-à-dire réapprendre à interrompre le temps pour procéder à la conversion utopique qui pourrait bien ressembler d’expérience à la conversion amoureuse.

4. Et parallèlement, ne pas céder à l’injonction de faire de l’histoire un savoir mort, et chercher vaille que vaille à lui conserver son statut de savoir politique à part entière, c’est-à-dire autant sa pointe vive d’actualité que sa capacité à rappeler la longue patience des peuples.

L’ensemble est accompagné d’une intervention graphique de François Méchain.

Cahier de Vacarme

Dans le Cahier, ce trimestre, Rodolphe Burger rend hommage au guitariste de blues James Blood Ulmer. Florent Martinez propose un récit inédit et Vacarme poursuit son travail de traduction de la poésie contemporaine anglo-saxonne en publiant des extraits de l’œuvre de Caroline Bergvall et Cole Swensen. Suzanne Doppelt & François Matton composent un nouveau tableau inédit. Olivier Schefer termine son feuilleton quand Stefka Stefanova Nikoleva, tsigane bulgare sédentarisée, a livré par l’entremise de Cécile Canut des pages de ses carnets. Enfin pour le plaisir, Lise Wajeman nous invite à relire ce que disait Ambroise Paré des « maladies faites par imaginations fantastiques ».

Lignes de Vacarme

Enfin les Lignes explorent toujours les obsessions politiques de Vacarme. Ainsi Aude Lalande a-t-elle réalisé un entretien avec le sociologue suisse Marc-Henry Soulet afin d’évaluer avec lui un possible pragmatisme dans les politiques de toxico-dépendances. Antonin Sopena conclut son enquête sur les droits fondamentaux. Michel Feher poursuit son anatomie du néolibéralisme en appelant à investir le lieu par excellence du capitalisme : la bourse. Par ailleurs, Vacarme publie l’intervention de Tiphaine Samoyault à la journée qui eut lieu en septembre à Montreuil en soutien aux Roms. Ariane Chottin & Caroline Izambert font le portrait du général serbe installé en Bosnie à Sarajevo Jovan Divjak qui milite contre les pièges des nationalismes de tout bord.

Les lignes sont accompagnées d’une intervention graphique du collectif de graphistes Formes vives.

Vacarme 53, automne 2010, 96 pages, 10 euros. ISBN/EAN : 9 78 23 50 96 01 97. Disponible dans toutes les (bonnes) librairies [1]. Diffusion en librairies assurée par Belles Lettres Diffusion Distribution.

Vacarme, numéro 53, automne 2010

Notes

[1Une liste, non exhaustive, des librairies qui disposent régulièrement des numéros de Vacarme est à votre disposition.