Victime en justice la place de la victime dans le droit pénal français

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La justice s’est au fil des siècles substituée au règlement interpersonnel des conflits et des dommages : elle s’est interposée entre la victime et l’auteur supposé du tort. Aujourd’hui, pourtant, la victime, au nom de la souffrance vécue et de la primauté de la réparation, s’impose comme un acteur majeur du procès. La loi, qui consacre la victime, l’élève-t-elle au rang de juge ?

Au moment où le champ d’intervention du droit pénal tend à croître à un rythme effréné et où cette extension est souvent justifiée par la nécessité de répondre aux voix des victimes [1], parfois d’ailleurs à leur corps défendant, on pourrait voir dans le simple fait de poser la question de la place de la victime au sein du processus pénal une terrible provocation. Et pourtant la provocation, si elle existe, doit certainement être vue ailleurs, par exemple dans le projet de loi portant adaptation de la Justice aux évolutions de la criminalité, qui lui propose de suivre l’application de la peine de l’auteur de l’infraction, en donnant son opinion sur les mesures d’individualisation envisagées. Du déclenchement des poursuites à l’application de la peine, en passant par le procès lui-même, la victime est désormais omniprésente. La loi du 15 juin 2000 renforçant la présomption d’innocence et les droits des victimes avait déjà, dans le nouvel article préliminaire au code de procédure pénale, précisé que « l’autorité judiciaire veille à l’information et à la garantie des droits des victimes au cours de toute procédure pénale », comme si ces dernières pouvaient ou devaient encore faire valoir des droits distincts de ceux de la société. Dans le projet de loi Perben II, on trouve désormais que « l’exécution des peines favorise, dans le respect des intérêts de la société et des droits des victimes, l’insertion ou la réinsertion des condamnés ainsi que la prévention de la récidive », consacrant une place à part entière de la victime dans le processus pénal.

Mais sans que cette place ne trouve une véritable justification, autre que celle liée à une souffrance morale ou physique. Le propos n’est pas de nier une quelconque souffrance causée par le passage à l’acte d’un individu ; le propos n’est pas non plus d’accepter cette souffrance comme la justification autosuffisante d’une intervention de la victime au processus pénal. À cet égard, un psychanalyste, Charles Melman, parle de « justice de confort », d’une « justice qui satisfasse le public, les familles des victimes », particulièrement inquiétante dans la mesure où la souffrance de la victime étant potentiellement infinie, sa satisfaction à travers le procès est souvent illusoire. Cette souffrance se trouve tellement en « excès », ou plutôt en différence par rapport à une éventuelle réparation au titre des intérêts civils, qu’elle joue également sur le quantum et la nature de la peine, et désormais, lors du face à face du délinquant avec sa peine.

Bien sûr, la victime n’a jamais été absente du droit pénal, car le dommage causé est, dans la plupart des infractions contre les personnes, déjà pris en considération par le texte lui-même. Selon que l’incapacité de travail qui aura résulté d’une infraction sera plus ou moins longue, la sanction encourue par l’auteur sera plus ou moins grave. Mais son rôle est ou devrait être très précisément délimité par la procédure pénale. Ainsi, aux termes de l’article 2 du Code de procédure pénale, la victime intervient au procès, en principe, dans un but de réparation du dommage qu’elle a subi du fait de l’infraction. Elle choisit la voie pénale plutôt que la voie civile essentiellement pour des questions de célérité et de facilités de preuve. Et on dit bien qu’elle ne doit pas se préoccuper de la question de la culpabilité ou de la peine. De plus, on se trouve en principe, en droit pénal, dans une relation typiquement verticale entre l’État et un justiciable et non au sein d’une relation horizontaleentre deux justiciables, un demandeur et un défendeur. Pourtant, il semble désormais que « la victime casse le face-à-face séculaire entre le criminel et le prince dans lequel elle faisait figure d’invitée, et lui en superpose un autre entre elle et le criminel » [2]. Cette évolution, ou cette cassure, est certainement liée à l’ambivalence de l’article 2 qui reflète la nature trouble de l’action civile. Celle-ci est intrinsèquement liée à son objectif, puisque le juge répressif se trouve amené à statuer dans une matière qui revient de droit au juge civil. Mais comme l’action civile se superpose à l’action publique, dont elle n’est indépendante que dans de rares cas, le ministère public intervient également au nom de la société pour demander la répression de l’infraction dommageable, de conserve avec la victime. Du coup, ce droit d’action civile est exercé dans un objectif indemnitaire et vindicatif à la fois. Il devrait en principe rester exceptionnel et être explicité comme une action civile tombée exceptionnellement dans l’escarcelle du juge pénal en raison de la commission d’une infraction, mais sans toucher à la nature de la victime. D’aucuns distinguent entre victimes civiles et victimes pénales, ce qui nous semble inutile, seule une logique pratique ayant conditionné le choix du mode pénal de réparation. Si infraction il y a, le juge pénal est compétent ; dans le cas contraire, c’est le juge civil. Le critère tient non pas à la qualité de la victime, mais à la caractéristique de la faute commise à l’origine du préjudice.

En effet, selon la logique affichée de prime abord par la procédure française, en l’absence d’une infraction formellement reconnue par une juridiction, la victime devrait être purement et simplement déboutée de son action au pénal et être amenée à se « pourvoir » devant les juridictions civiles. Contrairement à la présentation qu’affectionnent certains, une attribution de dommages-intérêts n’est plus forcément liée à une décision de condamnation. L’affirmation du contraire continue à entretenir la confusion de la nécessaire reconnaissance de culpabilité pour l’octroi de dommages-intérêts, et donc la confusion dans l’esprit de la victime de son rôle tant vindicatif qu’indemnitaire au procès. Il suffit, pour se convaincre de la dissociation de la reconnaissance de culpabilité et des intérêts civils, de lire les dispositions du Code de procédure pénale qui réglementent les effets de l’action civile. En matière criminelle, la partie civile, dans le cas d’acquittement comme dans celui d’exemption de peine peut demander réparation du dommage résultant de la faute de l’accusé, telle qu’elle résulte des faits qui sont l’objet de l’accusation. En matière correctionnelle, il est également possible de demander à la juridiction de se prononcer sur les intérêts civils en cas de relaxe concernant une infraction non intentionnelle. En outre, et si la juridiction pénale a retenu l’absence d’une infraction, le juge civil peut encore être saisi par la victime. Il est simplement limité par la décision du juge pénal, et doit donc qualifier autrement les faits qui lui sont soumis (une personne relaxée au pénal pour diffamation peut ainsi être amenée à verser des dommages-intérêts pour avoir tenu des propos désobligeants au civil). De plus, en matière délictuelle, l’absence de faute pénale non intentionnelle ne fait pas obstacle à l’exercice d’une action devant les juridictions civiles afin d’obtenir la réparation d’un dommage. La demande d’indemnisation n’est donc plus ipso facto dépendante de la reconnaissance d’une responsabilité. Mais là encore, cette situation semble inextricable, la victime obtenant la plupart du temps réparation devant une juridiction pénale. La clarté des rôles des uns et des autres n’en sort certainement pas améliorée.

Déjà la loi du 11 juillet 1975 qui rendait possible la constatation de la culpabilité d’un individu sans le prononcé d’une peine lorsque, entre autres choses, le préjudice causé à la victime a été réparé, était symbolique d’un système pénal vacillant, comme si le dommage causé devait conditionner l’existence et le quantumde la sanction. Certainement aussi, cela marque l’échec d’un État à s’affirmer véritablement et abstraitement comme un État pénal, détenteur unique de la violence légitime par le biais du contrat social. D’après Antoine Garapon, « la constitution de l’État et du monopole de la violence légitime se réalisa en effet, par un accaparement de la vengeance et par une exclusion du pardon interpersonnel » [3], la victime perdant du même coup son rôle essentiel dans la justice.

Il y a quelques siècles de cela, la victime était une partie fondamentale au procès, car la justice pénale consistait en fait en une vengeance privée. Toute personne membre du clan de la personne agressée pouvait être chargée de la vengeance, qui pouvaits’exercer sur tout membre du clan de l’agresseur. Aucune restriction d’ordre moral, aucune limitation dans son étendue. Il s’agit d’une responsabilité pénale collective, qui ne se fonde que sur le dommage subi et jamais sur une culpabilité établie. Plus sophistiquée, la justice privée marque un « progrès » dans la mesure où elle obéit à certaines règles. On peut parler de justice dans la mesure où on sort de l’arbitraire et de l’exercice illimité de la force brutale. Et de justice privée, car elle reste exercée par la victime ou sa famille. L’État se contente d’encadrer la répression, en limitant le droit de vengeance à certains membres de famille proches de la victime et en introduisant une certaine proportionnalité entre le mal commis et le mal à infliger. Jusque-là, on avait une justice essentiellement privée, dans son déclenchement, dans son déroulement et dans son but. Dans son déclenchement parce que l’initiative demeure celle de la partie lésée, dans son déroulement parce que la partie lésée est quasiment le seul maître à bord, et dans son but parce qu’il s’agit exclusivement de la réparation et de la satisfaction de la victime et de ses proches.

À partir du 11ème siècle, le système de justice tend à devenir public, dans la mesure où l’Etat se reconnaît, dans certaines situations extrêmement bien délimitées, la possibilité d’engager une procédure de « jugement » indépendamment de l’action de l’existence d’un accusateur privé. Commence alors le mouvement de distinction de l’État et de la victime, de la rétribution et de la réparation, du dommage objectif et de la faute « morale », jusqu’à aboutir à une modification en profondeur du système pénal à partir du 14èmesiècle. C’est certainement à cette époque que l’intérêt de l’État commence à primer sur celui de la victime, cette dernière, selon les termes de Jean Pierre Allinne, n’étant « plus qu’un symptôme du désordre subi par l’État » [4]. Sauf qu’elle continue à prendre part au procès pénal, par la voie de la constitution de partie civile, qui est une réminiscence de la fonction de poursuite qu’on appelait aussi « accusation de partie formée » et de l’ancienne « dénonciation de partie lésée » par laquelle la victime intervenait au procès comme un simple témoin à charge. Alors, au 17ème siècle, si la faute commise était réprimée pénalement, la victime pouvait voir son action civile aboutir sur le versement de dommages-intérêts. Dans le cas contraire, il n’y avait pas de réparation au pénal, seule une action au civil était envisageable, quoique techniquement difficile à mener. Jean Pierre Allinne rappelle d’ailleurs qu’aucune réparation n’était prévue au pénal en cas d’homicides purement accidentels.

Dans un lent mouvement de balancier, la victime a commencé à retrouver des lettres de noblesse à partir du début du 20ème siècle, certains auteurs ayant commencé à s’émouvoir du peu de poids qui lui était accordé. Mais c’est seulement à partir des années 70 que les victimes ont commencé à prendre une place importante dans le dispositif pénal, par le biais de textes aussi bien internationaux que nationaux. Désormais, elle revient dans tous les textes pénaux, de droit substantiel ou procédural, comme une sorte de litanie, du premier moment de l’instruction au dernier moment de l’application de la peine, comme l’alter ego du délinquant.

La mise en place d’un droit pénal public étant liée à la naissance et au renforcement du pouvoir étatique, la place grandissante octroyée à la victime peut être interprétée comme le symbole de l’échec de l’Etat à s’affirmer comme un Etat pénal, légitime à intervenir pour de simples raisons de rétribution. De plus, la victime endosse, et certainement parfois à contrecœur, le rôle de l’accusateur et du juge. Or le jugement pénal vient poser un terme à une répression potentiellement infinie et détacher le délinquant de son acte. Puisque la réparation du préjudice fait aussi partie du procès, le jugement a également pour mission de poser un terme à la victimisation, et de détacher la personne de son préjudice : votre acte vaut tant, le préjudice qui vous a été causé doit être réparé à hauteur, mais vous devez passer du statut de délinquant ou de victime à celui de membre de la communauté. Si le procès pénal ne parvient plus à ce résultat, ouvrant ainsi un infini du délinquant, de la répression et de la victime, il y a faillite de tout un système.

Dans cette perspective, la souffrance de la victime comme la dangerosité de l’auteur sont des paramètres permettant de justifier des mesures de sûreté, donc des sanctions pénales, de manière quasi illimitée. La dangerosité est un concept qui naît au moment où l’enfermement arbitraire des fous, des vagabonds, ne peut plus être justifié autrement : « perçu comme un malade irresponsable, le fou ne peut faire l’objet d’une sanction pénale ; perçu comme dangereux, il ne pouvait être laissé en liberté. Cette aporie ne pouvait être résolue que par l’instauration d’un internement à caractère thérapeutique susceptible de satisfaire à ces deux exigences à première vue contradictoire » [5]. La dangerosité, concept extrêmement vague et contesté issu d’une incapacité à penser différemment la responsabilité pénale dans la théorie du droit pénal, peut porter à des excès, notamment en termes de peines perpétuelles, que l’on appelle pudiquement mesures de sûreté. De manipulation délicate, la dangerosité cède la place à la souffrance de la victime comme justification de l’intervention pénale. Là aussi, l’infini de la souffrance signifie l’infini de la répression. Or, le jugement pénal se doit de mettre un terme, de donner une mesure à ce qui est incommensurable. Certes, on n’en est pas encore tout à fait là. Mais lorsqu’on reconnaît à la victime le droit d’exprimer son avis quant à la mesure de libération conditionnelle qui est envisagée à l’égard d’un détenu, on prend en compte une souffrance qui, sans cesse invoquée, ne pourra jamais être apaisée.

Bien que certains responsables d’associations de victimes puissent par ailleurs réclamer une place de la victime au cœur du procès pénal, il n’est pas sage de la part de l’Etat de leur donner raison et de confier à la victime une tâche qu’il n’est pas capable d’assurer lui-même. On justifie cela à très bon compte : « en prenant soin d’intégrer, dès l’origine, la victime au procès pénal, lui rendant ainsi un rôle actif, la loi nouvelle doit lui permettre de mieux comprendre cet autre qui est l’auteur de ses souffrances, de lui parler, de lui dire ses douleurs, son incompréhension et par-là, aussi, de mieux accepter l’irrémédiable ». On entretient ainsi chez la victime une illusion à la fois d’apaisement à travers le procès pénal et de toute-puissance. Sauf à la mettre dans la position de l’accusateur ou du juge, voire de la victime éternelle, la reconnaissance de culpabilité, le choix de la peine et l’application de la peine ne la regardent pas.

D’abord, l’application de la peine, processus qui met en principe le délinquant face à lui-même. Si la victime intervient encore à ce stade, on rejoue à nouveau le procès pénal, en effaçant le détachement de l’auteur par rapport à son acte, rappelé sempiternellement, et en entretenant la souffrance chez la victime qui joue le rôle de l’accusateur perpétuel. Ça ne facilite en rien un travail de deuil. C’est en plus lui donner la preuve que sa parole doit s’exprimer de manière autonome, qu’elle n’est pas membre de la communauté qui a reconnu à l’État le monopole de la violence légitime, et que donc l’État ne peut jouer véritablement son rôle.

Ensuite le choix de la peine, qui est guidé par trois théories principales : la rétribution, la dissuasion et la réforme. Aucun de ces trois fondements ne concerne à proprement parler la victime individuelle, mais bien les relations entre le criminel et la société, dont la victime n’est qu’une voix. Le dommage physique ou moral, non incriminé par la loi pénale, ne devrait donc pas être retenu comme une cause d’aggravation de la peine. Les audiences correctionnelles en donnent pourtant des illustrations quotidiennes : par exemple le fait que la victime exprime par une lettre son sentiment d’être quotidiennement violée moralement par la présence d’un squatter dans son appartement a entraîné une peine d’emprisonnement d’un an ferme, alors qu’il s’agit d’un litige qui devrait se résoudre au civil. Quel est alors le fondement de la peine ? La vengeance a raison de la souffrance de la victime ? Telle ou telle peine fait-elle la victime plus ou moins victime ? Quels sont par ailleurs les effets d’une décision estimant que la victime subit un préjudice en ne pouvant plus désormais vivre une « vie normale » ? Comme le constate un chroniqueur judiciaire, « l’idée qu’une victime puisse sortir d’un procès calmée ou consolée est une stupidité. Je n’ai jamais vu une victime satisfaite d’une sanction quelle qu’elle soit. On trompe les victimes en leur faisant croire à une justice rédemptrice. La justice n’est pas une assistante sociale, elle n’est pas un prêtre, elle n’est pas là pour consoler, elle est là pour punir » [6].

Au début du procès, il y a la reconnaissance de culpabilité : le dommage causé entre souvent pour une grande part dans la qualification juridique des faits commis ; selon l’atteinte qui a été causée par des coups, on peut passer de la contravention au crime. C’est donc un élément qu’on ne peut laisser hors de cause. Cela dit, la victime n’a pas à intervenir dans le sens de la culpabilité de l’individu, elle doit en principe intervenir simplement en ce qui concerne les intérêts civils, donc la réparation. Or celle-ci n’est pas dépendante de la reconnaissance de culpabilité, comme on l’a déjà vu plus haut.

Reste en définitive l’idée de réparation qui semble fondamentale, certainement tant pour la victime que pour l’accusé. Mais doit-elle être nécessairement liée à la tenue d’un procès dans lequel la victime serait partie ? Platon lui proposait une place intéressante. Selon lui, la réparation du dommage subi par la victime devait être effectuée en amont du procès pénal. C’est un préalable posé à l’exercice de la justice pénale, à son exercice « serein », détaché de l’affect. Là encore, il faut admettre, avec Denis Salas, que « la souffrance de la victime est toujours en excès par rapport à la réparation que la justice peut lui offrir, donc elle est potentiellement infinie » [7]. Face à cette souffrance, l’office du juge est précisément de la limiter, au moins symboliquement, et de cantonner le dommage subi à un symptôme du trouble à l’ordre social. Cela permettrait en outre qu’on ne trouve plus dans le Code de procédure pénale que « le condamné peut obtenir une réduction de peine en s’efforçant d’indemniser la victime », en confondant ainsi action publique et action civile.

Cette forme de procès est envisageable : la victime obtient réparation de son préjudice préalablement à toute audience de jugement ; si les faits sont rattachés à la personne jugée ultérieurement, cette dernière aura à charge de payer l’indemnisation ; si tel n’est pas le cas, la commission d’indemnisation des victimes d’infraction la fera sienne. On retrouve d’ailleurs cette formule en France à travers une procédure comme la composition pénale, qui suppose formellement l’indemnisation de la victime s’il en existe une. Ce mécanisme, parfois contesté et contestable à de nombreux égards [8], est pourtant intéressant, car le législateur a tenté de donner à la victime une place « platonicienne » dans le procès, en subordonnant le déroulement et la validité de la composition pénale à l’existence d’une indemnisation de la victime. La nouvelle comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité en est également une tentative, dans une moindre mesure. Si ces procédures, malgré toutes les critiques qui peuvent leur être adressées par ailleurs, étaient venues remplacer toutes les autres formes d’intervention de la victime au procès et non pas encore accroître leurs facultés, elles auraient très certainement modifié fondamentalement l’histoire du droit pénal. Mais ces procédures nouvelles de gestion de la délinquance montrent surtout que notre système pénal, dans l’esprit du législateur, se passe désormais plus volontiers d’un juge que d’une victime.

Notes

[1Encore très récemment, un groupe de travail préconisait la création d’une juridiction ad hoc pour juger les fous en estimant nécessaire de « répondre à la très forte demande des victimes de mise en place d’un réel débat » et que « toutes ces modifications devraient permettre de répondre au souci justifié des victimes de voir s’organiser un débat complet et contradictoire ». Le Monde, 25 décembre 2003.

[2Antoine Garapon, « Une Justice pour la victime », in Et ce sera Justice – Punir en démocratie, Ed. Odile Jacob, 2001, p. 260.

[3Ibid, p. 259.

[4Jean Pierre Allinne, « Les victimes : des oubliées de l’histoire du droit ? », in Œuvre de justice et victimes, sous la direction de Robert Cario et Denis Salas, L’Harmattan, 2001, p.25 et s.

[5M. van de Kerchove, « Culpabilité et dangerosité – Réflexions sur la clôture des théories relatives à la criminalité », in Dangerosité et justice pénale, Ed. Masson, 1981, p. 296.

[6M. Peyrot, « Les consternants procès des malades mentaux », Journal français de psychiatrie, n°13, 2000, « Faut-il juger et punir les malades mentaux criminels ? », Ed. Eres, Fenouillet, p. 18 à20.

[7D. Salas, « Pourquoi punir », Journal français de psychiatrie, n°13, 2000, « Faut-il juger et punir les malades mentaux criminels ? », Ed. Eres, Fenouillet, p. 8 à9.

[8Voir l’entretien avec Gilles Sainati, Vacarme n°22, hiver 2003.