Vacarme 21 / Arsenal

Journal de répression violences faites aux prostitué(e)s à Lyon

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Depuis mai 2002, Cabiria, une association de santé communautaire, tient la main courante des violences faites aux prostitué(e)s de Lyon. La police de M. Sarkozy y rivalise avec celle de M. Collomb (maire PS de la ville). Riverains et commerçants font des rêves de milice. Les communautés se déchirent. Journal d’une insécurité.

Mai 2002

Lors des demandes de couverture maladie universelle (CMU), afin de renouveler leurs droits, les personnes doivent dorénavant fournir un acte de naissance qui est bien sûr souvent impossible à donner par les personnes concernées.

Une femme africaine venant d’Espagne s’est vu refuser sa demande d’aide médicale d’État (AME) pour soigner une grave maladie, sous prétexte qu’elle avait sans doute de l’argent et qu’elle ferait mieux d’aller se faire soigner en Espagne.

Samedi 25 mai 2002

Une même personne a subi sept contrôles de police entre le Pont Morand et le Pont de l’Université entre 22h et 23h.

Mardi 28 mai 2002

Intervention de police en soirée par une vingtaine de fonctionnaires à Perrache. Deux filles ont été embarquées : une femme africaine et une nouvelle sur le cours Charlemagne. Les policiers ont été odieux et agressifs. Ils ont attrapé une fille qui n’avait pas ses papiers. Elle a dit à un membre de l’équipe présent à ce moment-là avec le bus [de Cabiria] qu’elle connaissait un des policiers et que tout irait bien. Mais le policier s’est détourné d’elle et elle s’est ensuite entendu dire : « La prochaine fois que tu n’as pas tes papiers, tu fermeras ta gueule, je t’embarque et je t’encule ! »

Entre-temps, une femme a réussi à s’enfuir, elle n’a pas de papiers depuis cinq ans et elle a très peur.

Juin 2002

Suite à la demande de la mairie de se déplacer au-delà de la rue Casimir Perier, une personne prostituée a obtempéré avec sa camionnette. Malgré cela, la police continue à lui dire de partir du nouvel endroit où elle s’est installée. Quatre PV pour stationnement abusif au même endroit ont été donnés quai Perrache dans la même soirée.

Mardi 11 juin 2002

Perrache, dans la « zone tolérée ». Une femme africaine s’est fait coincer par la police alors qu’elle faisait une fellation à un client. Les policiers l’ont menacée, ont pris son nom et ont exigé une attestation de domicile. Ils lui ont également dit que s’ils la trouvaient de nouveau dans le secteur, ils l’emmèneraient au poste où elle passera la nuit.

Suite à une bagarre sur le tapin, une femme de l’Est a fait un avortement spontané. Elle a appelé la police et a voulu porter plainte mais ils n’ont pas pris sa demande en considération.

Une femme yougoslave s’est fait voler son portable ; elle a accosté un policier pour déclarer son vol, ce dernier lui a dit qu’elle n’avait qu’à s’en racheter un.

Mercredi 12 juin 2002

Une femme prostituée française a constaté que sa camionnette avait été emmenée à la fourrière. N’étant pas présente lors de la mise en fourrière, lorsqu’elle est venue récupérer son véhicule et qu’ils ont vu qu’elle était française, ils ont accepté de lui rendre gratuitement en avouant qu’ils croyaient que c’était la camionnette d’une femme africaine. Le capitaine du commissariat du 2ème arrondissement lui-même a dit texto que les femmes françaises n’étaient pas visées et que c’était des actions contre les étrangères.

Dimanche 16 juin 2002

Descente de flics rue Grollée, « zone autorisée ». Contrôles de papier faits à des Camerounaises.

Entre le 17 et le 24 juin 2002

Trois amendes pour stationnement illégal ont été données à la même personne en une journée. Les flics conseillent aux filles de travailler en estafette.

Des riverains de la rue Auguste Comte menacent les filles de leur faire la peau. La police a averti les filles qu’il y aurait une grande opération de « nettoyage » le 2 septembre 2002.

Jeudi 20 juin 2002

Cours Charlemagne vers Perrache. La police a demandé à cinq personnes brésiliennes de se déplacer en leur signalant qu’elles ne devaient pas rester en face des immeubles, qu’ils déporteront celles qui n’ont pas de papiers et donneront des PV aux autres. Les filles se sont déplacées quai Rambaud.

Mardi 25 juin 2002

L’adjointe à la sécurité du 2ème arrondissement nous a appelés pour nous prévenir qu’au bout de la rue de Condé, angle quai Joffre, il y a habituellement une prostituée de l’Est et que depuis quelques temps il y en a quatre autres. Elle a brandi la menace d’une réaction des riverains et a précisé qu’elle nous appelait pour que nous fassions quelque chose car la police « a des moyens limités ». Nous avons proposé une médiation.

Nuit du 25 au 26 juin 2002

Sur le quai du Rhône en face du Sofitel dans le 2ème arrondissement de Lyon, la police a contrôlé et embarqué un jeune garçon non fiché pour vérifier son titre de séjour. Il a été gardé à vue toute la nuit.

Fin juin

La direction Sécurité et Prévention de l’Hôtel de Ville a appelé Cabiria pour l’informer que le directeur de l’hôtel [nom, adresse NDLR] a envoyé une lettre de plainte à l’encontre des personnes prostituées travaillant entre Perrache et son hôtel. Une lettre va lui être envoyée l’informant que nous disposons d’une ligne « Habitants » à laquelle il pourra nous demander de faire médiation.

Juillet 2002

De nombreux contrôles abusifs se poursuivent, accompagnés d’intimidations, derrière Perrache et sur la Presqu’île (berges). Les flics disent aux clients des travestis « Regardez, ce sont des garçons, vous allez avec des garçons ».

Les flics interrogent pour savoir si les personnes prostituées françaises sont gênées par les migrantes.

Une jeune africaine détenue au centre de rétention de Saint-Exupéry s’est vu prendre son portable par la police qui a relevé tous les numéros qui y étaient enregistrés.

On note une forte augmentation du sentiment de peur au sein de la communauté, qui touche aussi bien les migrantes que les « traditionnelles ».

Jeudi 4 juillet 2002

La mairie centrale prépare un arrêté municipal interdisant la prostitution dans certains quartiers, à certaines heures et à moins de cinq cents mètres des écoles et églises. Elle prévoit l’interdiction des camionnettes, etc. Beaucoup de PV et de gardes à vue sont à prévoir.

Vendredi 5 juillet 2002

Une femme s’est vu prendre à parti par la police des moeurs, lui disant qu’elle devait travailler ailleurs puisqu’elle empêchait les deux autres femmes (à l’initiative des premières pétitions contre les femmes de l’Est) à proximité de bosser Elle est convoquée aux Moeurs lundi 8 juillet 2002 à 11h.

Samedi 6 juillet 2002

Une personne prostituée s’est faite harceler par deux policiers. Menaces, envers elle ainsi qu’à l’attention du client la prochaine fois, elle récoltera un PV pour exhibitionnisme.

Lundi 8 juillet 2002

La même femme à qui deux policiers avaient déjà demandé de travailler ailleurs s’est rendue à son rendez-vous chez les Moeurs où elle leur a dit qu’elle était là depuis plus longtemps que les autres et que, donc, elle resterait.

Mercredi 10 juillet 2002

Gerland, Mc Do, 23h deux policiers dans le 7ème arrondissement, un homme et une femme, ont menacé un client d’une nouvelle loi PV. Un avertissement pour cette fois. La prochaine, une amende.

Jeudi 11 Juillet 2002

De l’équipe de nuit, on apprend que la violence monte sur le terrain, surtout entre blacks. Quai Rambaud, une femme s’est fait tabasser par d’autres à coups de barre de fer. Sinon, des Camerounaises en camionnette foncent sur d’autres (anglophones). Une voiture [immatriculation NDLR] 4/4 gris Patrol, prend des photos et filme sur les quais.

Tournées de rue de jour l’équipe a reçu des cailloux sur la voiture par des gosses et, la nuit, des jets d’oeufs.

Dimanche 14 juillet 2002

Une jeune femme de l’Est s’est fait agresser par un homme qui l’a attirée dans un coin isolé sous prétexte de faire une passe. Là, il l’a faite monter dans sa voiture où il l’a prise violemment par le cou. La jeune femme est sortie du véhicule, a couru sur cinq cents mètres, poursuivie par l’agresseur. Une voiture l’a prise en stop mais l’agresseur l’a poursuivie avec sa propre voiture.

Nuit du 16 au 17 juillet 2002

Un car de CRS s’est arrêté quai Rambaud pour discuter avec des « traditionnelles ». Après leur départ, l’équipe s’est approchée pour connaître la teneur de leur discussion. Les CRS leur ont dit que des femmes de l’Est venaient d’être placées non loin d’elles et qu’elles devaient les chasser.

Une femme d’origine étrangère dont un des clients est policier nous a informés que celui-ci l’avait prévenue de l’augmentation de la répression contre les prostituées avant qu’elle ne commence, et que récemment il l’avait de nouveau avertie que cette fois toutes les migrantes seraient expulsées et que même les femmes d’origine étrangère subiraient des pressions. De plus, les « traditionnelles » seraient poussées dans des ateliers de réinsertion et une action importante va sans doute avoir lieu en septembre 2002.

Mercredi 17 juillet 2002

Une femme de l’Est a été prise à parti dans le quartier de Gerland par des « traditionnelles » travaillant à plusieurs kilomètres de là. Celles-ci lui ont demandé de partir d’ici et même de France puisque de toute façon, en septembre, elle sera expulsée.

Depuis un mois à Gerland, les clients sont inquiétés par la police qui les sort des voitures et les menace de leur donner des PV s’ils les revoient avec des personnes prostituées.

Jeudi 1er août 2002

L’arrêté municipal anti-prostitution est entré en vigueur à Lyon.

Une jeune Albanaise travaillant en face du quartier Général Frère a été accostée par S. et plusieurs Albanais qui l’ont menacée avec un tournevis. Ils lui ont enjoint de cesser de travailler à cette place. Ils étaient dans une Renault Clio bleue [immatriculation NDLR].

La même jeune femme nous a raconté qu’il y a de cela deux mois, elle avait été passée à tabac par une personne apparemment payée pour le faire. Il lui aurait dit que plus il la frappait, plus il récolterait d’argent.

Environ à la même date, elle a été mise en garde à vue par la police alors qu’elle faisait un client. Le client n’a pas été inquiété mais elle a dû passer la nuit au poste, transie de froid, et a dû subir une fouille anale.

Nuit du 1er au 2 août 2002

Lors d’une tournée exceptionnelle en voiture, nous avons fait la connaissance d’une jeune Bulgare récemment arrivée à Lyon, sur les quais en direction de Gerland. Lors de notre conversation avec elle, un habitant aviné et en colère de l’immeuble d’en face est descendu et nous a interpellés. Il nous a enjoint de dire à la jeune femme ne parlant pas français qu’elle gênait et qu’il fallait qu’elle s’en aille.

Vendredi 2 août 2002

Une « traditionnelle » d’une soixantaine d’années se rend sur les quais avec une baguette et chasse les filles de l’Est du trottoir. Une autre est intervenue pour les défendre. La première a alors appelé la police qui est intervenue calmement en leur demandant de régler ce problème à l’amiable et en faisant remarquer que de toute façon, en septembre, il n’y aura plus de problèmes.

Nuit du 2 au 3 août 2002

La police a averti une femme exerçant dans une camionnette derrière Perrache qu’à partir du 5 août elle devrait partir.

Nuit du lundi 5 au mardi 6 août 2002

Une jeune femme de l’Est exerçant à Gerland a été chassée par la police. Le bus de Cabiria a été investi par TLM [télévision locale NDLR] qui a pratiquement voulu filmer de force la tournée. TF1 ou une autre chaîne a également été vue filmant dans les rues de Lyon.

Mardi 6 août 2002

Les camionnettes stationnées derrière Perrache utilisées par quelques « traditionnelles » ont été chassées par la police.

Nuit du mardi 6 au mercredi 7 août 2002

Des rumeurs courent parmi les personnes prostituées. Elles auraient des preuves que certaines femmes exercent dans des sous-sols, loin des regards des passants et de la police où elles seraient d’autant plus victimes de violences.

Nuit du vendredi 16 au samedi 17 août 2002

Quai Rambaud, zone autorisée non concernée par l’arrêté municipal. Un car de CRS [immatriculation NDLR] s’est mis à contrôler une femme de couleur alors qu’elle était avec un client. Ils sont restés de 22h à 0h30. Le client a également été contrôlé et menacé de représailles la prochaine fois qu’ils le prendraient avec une personne prostituée. La jeune femme s’est vu dépouillée de son argent après fouille du sac. L’argent a été rendu au client.

Dimanche 25 août 2002

Un PV pour exhibitionnisme a été donné à un client dans un parking souterrain par la police nationale.

Il y a environ 6 mois, une saisie de 40 000 euros a été faite au domicile de deux femmes de l’Est au cours d’une enquête où des proxénètes ont été appréhendés. Il s’est avéré que ceux-ci n’avaient pas de lien avec les deux femmes. L’argent ne leur a pas été rendu.

Aux environs du 28 ou du 29 août 2002

Un PV a été donné à un client en plus d’une menace d’emprisonnement d’un an si récidive.

On note que les personnes ont de plus en plus peur de travailler dans des endroits isolés, ce qui les retient de se déplacer.

Soirée du vendredi 30 août 2002

Une descente de police aurait eu lieu.

Samedi 31 août 2002

Le propriétaire de l’appartement loué par une personne prostituée a envoyé des gens chez elle afin qu’ils prennent des objets de valeur pour compenser des impayés de loyer, et ce malgré sa procédure de surendettement.

Lundi 2 septembre 2002

Une demande d’asile sanitaire a été refusée à une personne Sierra-Léonaise séropositive sous prétexte qu’elle ne réside pas en France habituellement, qu’elle a de la famille dans son pays et qu’elle a fait une demande d’asile politique préalable.

Une camionnette récemment garée rue Montrochet a été incendiée entièrement, c’est sans doute un règlement de compte.

Nuit du 1er au 2 septembre 2002

Une personne de l’Est travaillant Quai Rambaud, zone autorisée, a été sortie de force du véhicule de son client par des habillés. Ils ont mis un PV pour exhibitionnisme à l’homme et ont menacé la personne de la mettre en garde à vue s’ils la reprennent ici.

Nuit du mardi 3 au mercredi 4 septembre 2002

La police a pris l’argent d’une femme lors d’un contrôle et l’a donné au client.

Dans la nuit au début du mois de septembre

Une femme de l’Est a été agressée par un client dans sa voiture et ce dernier l’a laissée sur le bord de l’autoroute. En faisant du stop pour rejoindre le centre de Lyon, deux autres hommes l’ont faite monter en voiture et ont également voulu l’agresser. Elle a pu s’enfuir en sautant du véhicule. L’individu a été appréhendé le 4 septembre.

Une jeune femme de l’Est albanaise s’est fait agresser par un client dont le physique correspond à celui du violeur sous-cité.

Des femmes se sont déplacées à Gare de Vaise mais subissent là-bas aussi le harcèlement des policiers.

Nuit du mardi 3 au mercredi 4 septembre 2002

Une personne transsexuelle a été agressée et violée par un individu à bord d’une voiture rouge de petite taille genre 205 ou Renault 5, avec une main de fatma pendue au rétroviseur. L’équipe de Cabiria a été appelée à son secours. Lorsqu’elles se sont rendues à l’hôpital, on a refusé de la recevoir avant qu’elle ne soit entendue par la police. L’entretien a débuté dans le couloir de la police et ce sont les personnes de l’équipe de Cabiria qui ont dû exiger que celui-ci ait lieu dans un bureau. De retour à l’hôpital, l’accueil a été très mauvais, la personne s’est vu refuser une douche après avoir été examinée et les médicaments de traitement d’urgence ne lui ont été fournis que six heures minimum après le viol alors que le délai à respecter est de quatre heures.

Nuit du mercredi 4 au jeudi 5 septembre 2002

Descente de police sur Perrache pour contrôle de masse et demandes de quitter le secteur.

Sur Gerland, lors d’un contrôle de police, la police a pris les photocopies de documents de demande d’asile d’une africaine anglophone et n’a pas voulu lui rendre.

Dans la rue Saint Jean de Dieu, une jeune femme moldave a été agressée par un client.

Nuit du jeudi 5 septembre au vendredi 6 septembre 2002

Une personne prostituée « traditionnelle » a appelé la ligne d’urgence de Cabiria à 21h45 du quai Rambaud, où le commissariat du 2ème arrondissement a fait une descente sur un territoire autorisé, chassé, menacé et insulté les personnes de l’Est tout en disant aux traditionnelles qu’elles pouvaient rester. Les policiers disaient aux filles de l’Est : « Allez travailler dans les autres villes de France », ils ont pris la photocopie des papiers de préfecture de l’une d’entre elles et ne lui ont pas rendu. Il y avait trois voitures de la police municipale et une voiture banalisée. Panique générale parmi les personnes de l’Est, même pour celles en cours de régularisation.

Le bus de Cabiria est dorénavant constamment insulté la nuit par des hommes qui passent en voiture à proximité. Exemple de phrases lancées : « Hé ! le car à putes ! ».

Nuit du mardi 10 au mercredi 11 septembre 2002

Deux jeunes personnes africaines travaillant à Bellecour ont été mises en garde à vue pour la nuit suite à une altercation avec une femme qui les avait insultées et agressées physiquement dans la rue. La police les a menottées, a pris leurs empreintes et a refusé qu’elles passent un coup de téléphone pendant leur garde à vue.

Nuit du mercredi 11 au jeudi 12 septembre 2002

23h, quai Perrache : deux voitures banalisées de la police judiciaire ont commencé à contrôler les personnes prostituées qui travaillent dans ce secteur. Le contrôle a eu lieu en présence du bus de Cabiria mais malgré cela, il a été assez musclé.

Parallèlement, les moeurs ont contrôlé les personnes à Gerland, Garibaldi et sans doute ailleurs. Ils avaient une liste de noms dans les mains et semblaient chercher des femmes sans doute en situation d’irrégularité. Ils disaient aux filles que bientôt d’autres policiers allaient les faire dégager.

Nuit du jeudi 12 au vendredi 13 septembre 2002

En début de soirée, les moeurs ont appelé notre ligne d’urgence pour nous prévenir qu’ils avaient mis une jeune africaine anglophone en garde à vue dans le cadre d’une enquête sur un réseau de proxénètes. Nous avons demandé à la voir mais ils ont refusé. Le motif de la garde à vue était uniquement [qu’ils voulaient] l’interroger dans le cadre de l’enquête et qu’ils avaient peur qu’elle ne s’enfuie avant que le traducteur n’arrive. Elle devait sortir le lendemain mais lorsque nous avons voulu savoir quand nous devions aller la chercher, nous avons été informées qu’elle avait été incarcérée pour une durée indéterminée et ce, toujours dans le cadre de l’enquête.

21h30 : Une jeune femme nous a appelées en urgence en se plaignant de maux de ventre. Nous nous sommes rendues [sur] place afin de l’emmener aux urgences si besoin était. Deux voitures de police se sont alors arrêtées à notre hauteur et environ quatre policiers municipaux et quatre CRS en sont sortis. Ils nous ont demandé ce que l’on faisait et ont averti la jeune personne qu’ils étaient venus pour la verbaliser. Nous leur avons expliqué que nous allions l’emmener à l’hôpital. Ils ont alors décidé de ne pas lui donner de PV mais que la prochaine fois, ils le feraient et que par conséquent elle ne devait pas revenir travailler ici.

Aux environs de 23h : nouvel appel en urgence d’une autre personne travaillant quai Sarrail. Elle et ses amies étaient aux prises avec la police qui leur dressait des procès verbaux. Nous sommes arrivées sur les lieux et avons constaté la présence de quatre voitures de police et d’au moins dix représentants des forces de l’ordre. Les personnes étaient apeurées et la police, autoritaire et désagréable, affirmait qu’elle ne connaissait pas ces personnes alors qu’habituellement leurs relations étaient amicales. Ils ont délibérément appelé l’une d’entre elles « Monsieur » alors que celle-ci a le physique et le statut de femme.

Une voiture banalisée a demandé leurs noms et les a recopiés à de jeunes Africaines anglophones travaillant à Gerland. N° immatriculation : [numéro d’immatriculation, NDLR].

Quai Jules Courmont : une jeune femme de l’Est s’est faite insulter par une riveraine qui a exigé qu’elle s’en aille et a appelé la BAC (Brigade Anti-Criminalité). Lorsque la BAC est arrivée, elle a donné une amende de 38 euros à la jeune fille qui a dû la payer sur-le-champ.

A suivre...voir l’actualisation sur le site de Cabiria

Cabiria

Créée en 1993, l’association Cabiria travaille dans deux directions : des actions de santé communautaire sur le territoire de la prostitution lyonnaise (prévention du VIH, du VHC et de la toxicomanie, accès au séjour et aux droit sociaux), et un programme de recherche sur le travail sexuel associant, à parité, prostitué(e)s, personnel de santé et chercheurs.

Dernières publications :

  • Rapport annuel 2001, Le Dragon Lune, Cabiria éditions, 2002.
  • Femmes et migrations : les femmes venues de l’Europe de l’Est, Le Dragon Lune, Cabiria éditions, 2002.

Cabiria, BP 1145, 69203 Lyon Cedex 01
tél : 04 78 30 02 65
fax : 04 78 30 97 45
mail : cabiria@wanadoo.fr
web : www.cabiria.asso.fr

la surenchère des pouvoirs

Le 7 mai, Nicolas Sarkozy, sitôt en fonctions, inaugure une série de visites aux forces de l’ordre par une descente sur des lieux de prostitution, à Paris, sur les boulevards extérieurs.

Le ministre précisera ses vues dans un projet de loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, adopté le 31 juillet par les parlementaires : « les auteurs de racolage actif ou de racolage passif feront l’objet de mesures systématiques d’éloignement et d’un retrait définitif de tout titre de séjour lorsqu’ils seront de nationalité étrangère. »

Pendant ce temps, prolongeant leurs expérimentations antérieures sur les SDF et les mineurs, des maires de toute obédience prennent des arrêtés anti-prostitution, à Aix-en-Provence, Avignon, Metz, Orléans ou Strasbourg. À Lyon, un arrêté du 29 juillet « considérant les nombreuses pétitions reçues », interdit « aux personnes se livrant à la prostitution de stationner de manière prolongée, ou de se livrer à des allées et venues répétées, à pied ou avec un véhicule, à une distance minimum de 100 m des établissements scolaires » dans plusieurs arrondissements de la ville.

À Paris, Anne Hidalgo et Christophe Caresche, chargés de préparer des arrêtés du même type, veulent déclarer la guerre à « l’esclavage de la prostitution », pas aux prostituées. Le lecteur jugera, au fil du journal de Cabiria, de la pertinence de cette distinction.