la douleur en héritage expérimentations politiques par les enfants de disparus (Argentine-collectif HIJOS)

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Comment porter l’héritage du statut de victime ? En Argentine, le collectif Hijos, constitué d’enfants de disparus sous la dictature, s’interroge à ciel ouvert sur le sens d’un legs si lourd, et donne à la victime de nouveaux visages. Héritant aussi de la lutte héroïque des Mères de la Place de mai, Hijos expérimente de nouvelles épreuves d’accusation et de justice, qui ressuscitent des modes oubliés de sociabilité collective.

Le 24 mars 1996 tombait un dimanche. Mauvaise nouvelle pour les soixante-dix organisations de droits de l’homme qui appellaient à une marche commune dans les rues de Buenos Aires, vingt ans après l’arrivée au pouvoir de la junte militaire et le début du Proceso (le « processus de réorganisation nationale », autre nom de la dictature) : les Argentins risquaient de rester chez eux, et de tourner le dos à un passé proche et douloureux. De 1976 à 1983, quatre gouvernements militaires successifs avaient pratiqué la torture et l’élimination physique des opposants au régime et de leurs proches. Bilan : près de 30 000 « disparus ». Pourtant, déjouant les pronostics, ce 24 mars 1996 réunit plus de 50 000 personnes (selon les chiffres officiels, le double selon les organisateurs) sur le trajet reliant la place du Congrès à la place de Mai. Dans la longue liste des commémorations, 1996 marque un tournant : l’espace du 24 mars, auparavant investi par des actes et marches de faible intensité, se fait plus visible, en même temps qu’il devient plus conflictuel. Le vingtième anniversaire du début de la dictature, largement médiatisé, est en effet marqué par l’irruption de nouveaux acteurs. L’État, d’abord, puisque pour la première fois un président de l’ère démocratique (le péroniste Carlos Saul Menem) évoque le coup d’État militaire dans un message télévisé. La jeune génération ensuite. Le 23 mars au soir, un concert de rock est organisé par l’association des Mères de la Place de Mai sur la place dont elles portent le nom. Ce concert inaugure une stratégie nouvelle pour l’association : transmettre ses luttes à la génération des fils et filles de disparus. « Nous luttons pour que vous puissiez vivre en liberté », explique Hebe de Bonafini, présidente des Mères de la place de Mai, aux 20 000 jeunes qui se sont déplacés ce soir-là : « Nous sommes les mères des trente mille disparus et de vous tous ». Cette stratégie de construction, par l’évocation d’un passé répressif, d’un lien sanguin entre différentes générations de victimes, a une conséquence directe : la première apparition publique d’un collectif baptisé H.I.J.O.S. (Enfants pour l’Identité et la Justice contre l’Oubli et le Silence), né en avril 1995 et constitué d’enfants de disparus sous la dictature, de survivants, de prisonniers politiques et d’exilés. En ce sens, 1996 est l’année de l’accouchement par les Madres (mères) des Hijos (enfants).

Ce passage de témoin entre deux organisations de victimes est cependant moins affaire d’hérédité (reproduction automatique) que d’héritage (legs que l’enfant s’approprie). Car l’apparente linéarité de la transmission dissimule de réelles évolutions, notamment dans la façon d’appréhender le statut de victime. Hijos prolonge la radicalité du discours des Mères de la Place de Mai, résumée par la formule et élargit les répertoires d’action argentins, en inventant de nouvelles stratégies d’occupation de l’espace. S’il l’on s’appuie sur les catégories définies par Howard S. Becker, les associations de victimes fonctionnent comme des « entrepreneurs » de mémoire, car elles veulent fixer le contenu de la mémoire publique et indiquent sur quel mode penser le passé. Becker distingue deux types d’« entrepreneurs » : ceux qui créent des normes, et ceux qui font en sorte qu’elles soient appliquées. On pourrait dès lors se risquer à l’hypothèse selon laquelle Hijos tenterait d’appliquer les « normes » définies par les Mères de la Place de Mai. L’enfantement de 1996 signifierait un passage à l’acte, une mise en pratique : l’application de la justice par tous les moyens. À la victime archétypale qui, enfermée dans son identité de souffrante, n’existe que par réaction aux autorités, succèderait la victime atypique, qui contourne la plainte et s’empare de l’action. Cette vision est toutefois réductrice, car elle confine les Mères de la Place de Mai dans le rôle étroit de mères pleureuses. Ces dernières ont en effet toujours refusé toute exhumation, réparation ou hommage rendu aux victimes, attitudes jugées trop passives. La jeune génération, parce qu’elle cultive un autre rapport au passé répressif, apporte de nouvelles réponses à une même interrogation : la condition de « victime » est-elle suffisante pour s’approprier la mémoire ? Faut-il avoir été victime, ou se définir comme telle, pour s’accaparer la légitimité du souvenir ? Répondre par l’affirmative ne risque-t-il pas, enfin, de consacrer la parole de la victime, aux dépens de celle de la légalité ?

Il faut d’abord se demander si les Hijos peuvent être considérés comme un groupe de « victimes ». Ce ne sont pas des victimes directes du régime répressif : ils appartiennent à la génération de l’après. Mais ils ont souffert psychologiquement de la disparition de proches, et partagé la peur du régime répressif. L’expérience de la peur suffit pour se qualifier de victime. Or le ressort psychologique sur lequel a reposé la dictature est la propagation, dans l’ensemble de la société, du sentiment de peur. Daniel Hermant décrit ainsi le mécanisme : « Par capillarité, la peur provoquée par la répression (...) de militants d’organisations clairement identifiées, ou quelquefois d’anonymes, est instillée à leurs proches, puis à des franges plus larges de la population, ce qui a pour effet d’empêcher la mobilisation de groupe et de freiner l’action collective [1]. » Dès lors, la catégorie de victime - et donc l’audience du collectif - sont virtuellement infinis : le des victimes n’est plus exclusif. En outre, la légitimité des actions menées par Hijos en qualité de « victimes » est assurée par un recours régulier et symbolique, dans les discours et chants du groupe, au soutien des victimes directes de la répression : « Ce que dit le gouvernement n’a pas d’importance / Nous n’oublierons pas ceux qui sont tombés / Ils sont présents dans chacune de nos luttes / Et grandit la lutte populaire ». Cette technique de récupération de l’ensemble des disparus au profit des luttes de l’association permet de dépasser la question de la représentativité du mouvement et de contourner les rapports de forces numériques.

Si l’identité réductrice et floue de victime ne suffit pas à créer l’homogénéité du mouvement, le collectif trouve son unité dans l’objectif radical qu’il s’assigne : vérité et justice. L’affirmation des organisations de victimes, dans l’espace public argentin, est en effet indissociable des politiques de justice mises en place par les gouvernements démocratiques successifs. L’impunité octroyée aux forces armées par les gouvernants, au nom de la nécessaire « réconciliation nationale », a nourri les processus de victimisation propres à ces collectifs.

Le retour de la démocratie et l’arrivée au pouvoir du radical Raul Alfonsín, le 30 octobre 1983, permet l’ouverture procès, devant des tribunaux militaires puis civils en 1985, des principaux membres de la junte. La loi du « Point Final », improprement désignée comme la première des lois d’amnistie, assigne, le 24 décembre 1986, un délai de soixante jours aux victimes et familles de victimes et de disparus, pour porter plainte contre un tortionnaire. Au delà du 23 février 1987, plus aucune plainte n’est reçue. En l’espace de deux mois, plus de trois mille plaintes sont déposées ; deux cents cas sont retenus. Le 4 juin 1987, la loi dite de l’« Obéissance Due » permet à l’ensemble des militaires en cours de jugement, à l’exclusion des généraux les plus gradés, d’invoquer la discipline hiérarchique et le respect des ordres des supérieurs pour s’exonérer de toute responsabilité pénale. Ces deux lois groupées ont permis à plus de mille tortionnaires d’éviter tout jugement. En 1987, seuls trente huit généraux devaient être jugés. Ils seront graciés dès l’arrivée au pouvoir du président Menem : les premiers décrets de grâces datent du 10 octobre 1989. De nouvelles vagues de grâce, en 1990 puis en 1992, libèrent de hauts responsables de la junte condamnés dès 1985. Quelques jours avant de décréter l’état de siège à la fin du mois de décembre 2001, le président radical Fernando De la Rúa promulgue un décret anti-extradition qui récuse toute demande d’extradition venant de l’étranger. Arguant de la souveraineté nationale, De la Rúa bloque ainsi les demandes française et suédoise d’arrestations et d’extraditions, dans le cadre de leurs enquêtes sur le plan Condor [2]. Pour les autorités, la responsabilité de la répression est partagée entre militaires au pouvoir et terroristes jugés « subversifs ». Il y aurait équivalence entre terrorisme d’État et terrorisme contre l’État : c’est la théorie des deux démons, déjà développée par Alfonsín. Ce corpus de décisions juridiques, mêlé à une interprétation pour le moins hasardeuse du Proceso, fonde la mémoire officielle de l’Argentine.

Les Hijos s’emparent des failles de la justice argentine et élaborent leurs actions sur ce vide juridique, comme l’indique le slogan du collectif : « S’il n’y a pas de justice, il y a un scratche ! ». En clair : puisque la justice institutionnelle est impossible, reste une justice collective, basée sur la condamnation sociale et exercée directement par les habitants du quartier. En ce sens, Hijos s’inscrit dans la continuité des Mères de la Place de Mai, qui elles aussi, rejettent la justice du présent, perçue comme corrompue et inefficace, pour développer un mode d’action a-juridique. Pour fissurer la mémoire institutionnelle, il invente un nouveau mode d’action, devenu sa marque de fabrique : le scratche [3], soit d’énergiques charivaris qui investissent le territoire du militaire-assassin, et s’achèvent en concentration devant son domicile, marqué à la peinture rouge.

Ce tribunal populaire se déploie autour de trois moments aux temporalités distinctes. Le temps de l’expertise consiste à retrouver la trace d’un ancien militaire aujourd’hui reconverti. Son parcours professionnel, d’abord : les fonctions exercées sous la dictature, les centres de répression dont il était en charge, et sa profession actuelle. Des éléments sur sa vie privée ensuite, notamment ses adresses et numéros de téléphone personnels. Hijos ne se contente donc pas de détenir la « vérité », mais de prendre le contrôle de la production de cette vérité, en « brossant l’histoire à rebrousse-poil », comme le suggère Walter Benjamin, à contre-courant de l’histoire officielle, celle des dominants. L’élaboration de cette fiche signalétique est sans doute l’étape la plus ardue [4], tant les archives concernant la dictature manquent en Argentine. Cette place accrue de l’expertise, dans laquelle l’association puise partie de sa légitimité, est un trait caractéristique des nouveaux répertoires protestataires. Elle compense la logique victimaire de l’organisation, en permettant aux Hijos de dépasser leur simple identité de victimes. Un des paradoxes que ce mode d’action intègre, en cela proche de celui d’un groupe comme Act Up, est de combiner l’objectivité froide de l’expertise, liée à la technicité des enjeux, et la réinvention symbolique de l’activité du groupe, qui vise à mobiliser l’émotion.

Commencent ensuite deux mois de travail avec le quartier où habite le tortionnaire (le scratché), autour d’un collectif inédit, baptisé la « table de scratche ». Autour de cette table imaginaire se rassemblent, aux côtés de Hijos, des associations de quartier et de simples habitants. Le système se veut démocratique et horizontal. Cette étape permet de repérer le lieu d’intervention : la composition sociologique de la population, l’emplacement des anciens centres de répression, les souvenirs des habitants... L’enquête permet également de décider du tracé de la manifestation, en privilégiant les lieux de mémoire de la zone. Ce second moment s’inscrit dans une tendance plus générale au renouveau des sociabilités de quartier en Argentine, dont Hijos a constitué l’un des signes avant-coureurs. Un mouvement à contre-courant de la logique d’individualisation à l’oeuvre depuis l’avènement de la démocratie (et surtout les dix ans de ménémisme), qui trouve son symbole le plus puissant dans l’apparition des assemblées populaires, réunions spontanées de voisins nées dans la foulée des 19 et 20 décembre 2001. Le voisin devient à nouveau visible ; le local émerge comme une nouvelle échelle du politique. Le scratche devient alors l’occasion de recréer, sur plusieurs mois, du lien social entre voisins, faisant surgir et s’entrechoquer les mémoires de la dictature.

L’ultime épisode du scratche se joue le jour de la manifestation. Celle-ci fonctionne sur le mode de l’accumulation, du gonflement : au fur et à mesure de la procession viennent s’ajouter groupes de musiciens, cracheurs de feu, jongleurs ou simples riverains que l’on a convaincus de descendre dans la rue. L’objectif de la manifestation est simple : livrer au quartier le nom de l’ancien tortionnaire. Parmi les slogans chantés lors de cette procession en forme de chasse à l’homme : « Alerte, alerte, alerte, voisins, à côté de chez vous vit un assassin » L’avancée du cortège est régulièrement coupée par la , instant où les corps s’arrêtent et bondissent en criant, pour mieux poursuivre leur route. Les corps sautent en même temps qu’ils se souviennent. Revenir sur ce passé douloureux est pour Hijos un début de victoire, qui explique le plaisir physique qui les anime durant le scratche.

Reste à enraciner la pratique quotidienne du scratche chez les habitants du quartier, pour que la condamnation sociale du tortionnaire perdure. « Pour forcer le militaire à déménager, de quartier en quartier, jusqu’à la fin de ses jours », précise un tract du collectif. Le scratche est bien un tribunal populaire des temps modernes : les commerçants du quartier refuseront de servir le coupable, les passants, quand ils le croiseront dans la rue, lui cracheront dessus, d’autres l’appelleront à son domicile à n’importe quelle heure. Cette justice sociale et atemporelle renvoie au registre de la plainte éternelle et intransigeante des Mères de la Place de Mai, marquée par le rejet de toute raison politique ou réaliste, de toute acceptation de pardon. Cette exigence d’une justice universelle témoigne aussi d’un autre rapport au temps. Le scratche atteint sa pertinence déployé sur le long-terme, auto-entretenu par les dynamiques locales. En ce sens, le long terme utopique qui sous-tend le scratche renvoie au long terme idéologique des opposants sous la dictature. Les Hijos importent les catégories et manières de penser des victimes de la dictature, prenant appui sur le passé pour réactiver des luttes révolutionnaires. Cette justice absolue est difficilement compatible avec le présent de la consolidation démocratique argentine, qui consiste en un processus approximatif, incertain, fait de tâtonnements successifs. Ce mécanisme de transposition des discours indique les limites des actions de victimes, souvent inconciliables avec la temporalité démocratique.

Dans son double mouvement de production de vérité et de justice, le scratche met en scène une mémoire qui s’obstine, qui ne se résigne pas à rester dans le passé, qui insiste sur sa présence. Les consignes du groupe semblent dès lors trompeuses : il ne s’agit pas de lutter contre le silence ou l’oubli, mais d’imposer une mémoire contre d’autres mémoires rivales, notamment officielles. Le scratche devient une figure de la dissidence, de l’éclatement. Les Hijos parviennent à faire dévier les récits officiels en assénant la primauté du point de vue de la victime, en rendant visible les absences. Didier Bigo insiste sur ce processus de visibilisation, compris comme symétrique de la figure de la disparition : « Si le pouvoir, par son atteinte aux identités, aux corps cherche à rendre invisible son empreinte, il crée aussi dans le jeu des interactions les conditions d’une visibilité du processus d’invisibilisation (...), par la présence de leur absence » [5]. L’absence devient visible dans la violence du scratche.

Finalement, la récupération par Hijos de la parole des « dominés ». a introduit un double déplacement, géographique et temporel. La pratique du scratche s’est étendue à l’Uruguay et au Chili (sous le nom de funa), et dans des pays européens à forte immigration argentine (Espagne et France). Cette dispersion géographique des corps s’oppose à l’attachement des Mères de la Place de Mai à la ville de Buenos Aires. Hijos établit ainsi un réseau transnational de victimes, reliées par Internet, qui n’est pas sans évoquer les « diasporas de publics enfermés dans leur bulle » décrites par Arjun Appadurai. L’anthropologue américain voit dans ces mouvements d’activistes, mais aussi de réfugiés et d’étudiants, forts d’une autorité morale, les « creusets d’un ordre politique transnational ».

L’effet de génération introduit quant à lui un glissement temporel. Walter Benjamin, dans ses Thèses sur la philosophie de l’histoire, évoque ce pacte secret entre générations : « N’est-ce pas la voix de nos amis que hante parfois un écho des voix de ceux qui nous ont précédés sur Terre ? (...) Il existe une entente tacite entre les générations passées et la nôtre. Sur Terre, nous avons été attendus. » La délivrance de la génération présente exige, non seulement la remémoration historique des victimes du passé, mais surtout l’accomplissement des utopies pour lesquelles elles ont lutté. La délivrance de la génération présente exige, non seulement la remémoration historique des victimes du passé, mais surtout l’accomplissement des utopies pour lesquelles elles ont lutté. Dans cette conception générative de l’histoire, la jeune génération « réactive l’étincelle de l’espérance », porte et réinvente la mission. Le soulèvement populaire qu’a connu l’Argentine en décembre 2001 a mis en lumière ce mécanisme de reconversion des luttes passées. Un glissement s’est opéré : l’« ennemi » à abattre n’est plus la dictature, mais le système économique en place. C’est en effet en 1976, année du coup d’État militaire, que les premières politiques néolibérales sont introduites dans le pays [6]. En suivant les réflexions de Sandrine Lefranc, on pourrait affirmer que l’opposition entre victimes et bourreaux en vigueur sous la dictature s’est convertie en un dualisme amis / ennemis depuis le retour de la démocratie. « Ennemis », et non « adversaires », ces acteurs qui négocient, acceptent les procédures démocratiques pour réguler la compétition politique. Les Hijos, en désignant l’ennemi que constitue le néolibéralisme, réactivent une rhétorique difficilement conciliable avec les règles démocratiques : « La logique de l’ennemi intérieur résiste au processus de pacification démocratique » [7]. Ce déplacement intellectuel permet aussi aux associations de victimes de ne pas s’enfermer dans la posture de justicier, et de s’affirmer comme association de résistance à la classe politique argentine « corrompue », et au système économique qu’elle soutient. Parmi les signes les plus visibles de cette évolution, l’insistance sur le fonctionnement horizontal de l’association (sans leader), ou encore l’évolution du sens donné au scratche, désormais qualifié de « révolutionnaire ». La pratique du scratcheest par ailleurs récupérée par d’autres groupes (syndicats, assemblées populaires...) et appliquée à des hommes politiques de l’ère démocratique, notamment les anciens présidents. Dans l’Argentine en crise, le responsable démocratique devient lui-aussi un « bourreau ».

Notes

[1Daniel Hermant, L’espace ambigu des disparitions politiques in Cultures et conflits, 13-14, printemps-été 1994, p. 90.

[2L’actuel président argentin, le péroniste Nestor Kirchner, élu en mai 2003, a abrogé le décret anti-extradition. En août 2003, les députés et sénateurs ont abrogé les lois du Point Final et de l’Obéissance Due. Cependant la Cour suprême de justice n’a toujours pas déclaré inconstitutionnelles ces lois. Les dernières déclarations de Kirchner laissent par ailleurs penser que seuls les militaires qui n’ont jamais été jugés seront concernés par de nouveaux procès, ce qui limiterait singulièrement la portée de ces décisions.

[3Le terme de scratche est la traduction de escrache proposée par Hijos-Paris. Le verbe escrachar, issu de l’anglais to scrach (griffer, rayer), signifie à l’origine le fait de rayer le nom d’un candidat sur un bulletin de vote.

[4Elle constitue un indispensable travail d’information complémentaire pour Nunca Más (plus jamais), rapport publié en septembre 1984 par la commission chargée de réunir des preuves sur les exactions commises sous le Proceso (CONADEP).

[5Didier Bigo, Disparitions, coercition et violence symbolique in Cultures et conflits, 13-14, printemps-été 1994, p. 10.

[6Le premier responsable des questions économiques sous le régime militaire, José A. Martínez de Hoz, a massivement désengagé l’État du secteur industriel.

[7Sandrine Lefranc, « Renoncer à l’ennemi ? Jeux de pistes dans l’Argentine postdictatoriale. » in Raisons Politiques, 5 janvier 2002, pp. 127-143.