Vacarme 21

automne 2002

Vacarme 21

À nos lectrices et lecteurs

Ce numéro, Vacarme 21 (automne 2002), est désormais archivé et tous ses articles sont accessibles dans leur intégralité. Vacarme aime la gratuité, mais une revue existe grâce à ces abonné·es.

Éditorial

Entretien

Enzo Traverso

Nous vivons une époque où la mémoire des victimes, objets de compassion, éclipse celle des vaincus, sujets oubliés. Enzo Traverso, histoirien, propose de les articuler : comment redonner une parole aux effacés de l’Histoire ?

Chantier

Dammarie-lès-Lys : les militants de l’incertitude

Deux émeutes en quatre ans (1993 et 1997), deux morts en deux jours (21 et 23 mai) : à nouveau confrontées aux violences policières, les cités de Dammarie-lès-Lys refusent à la fois la clôture de l’enquête et la bataille rangée. Chronique d’un mouvement.

avant-propos

par

Déclaration de Tarek (MIB), le jeudi 6 juin 2002, sur le lieu de la mort de Mohammed Berrichi :
« À l’heure actuelle, on ne sait pas comment ça s’est passé. On n’a pas de témoignage. La vérité. On va dire la vérité : on n’a pas de témoignage qui dit « Voilà, ils l’ont touché ». Mais il y a tellement d’ancienneté, d’anecdotes qui se passent, ils ont une telle habitude de violence, ils ont une telle habitude d’un comportement discriminatoire qu’on ne croit pas dans ce qu’ils disent, qu’on (...) Lire 

la puissance du doute

par

La mobilisation provoquée par la mort de Mohamed Berrichi, le 23 mai, au terme d’une course-poursuite avec la police, à Dammarie-lès-Lys, est exceptionnelle à plusieurs titres. Non seulement parce qu’elle a refusé l’émeute, mais parce qu’elle ne plaide rien d’autre que l’incertitude : contre les preuves policières et la hâte idéologique, une politique du doute, adossée à l’expérience du danger.
A Dammarie-lès-Lys, la protestation s’élève en dissonance. Sa langue n’est pas celle de la (...) Lire 

autoportraits - 1/ Abdelkader Berrichi

Ce portrait ainsi que les trois autres qui l’accompagnent sont des itinéraires militants, dits à la première personne du singulier, à visage découvert.
Ils ne « redonnent » pas « la parole » à des gens « prives de parole ». Les quatre personnes dont il s’agit n’ont au contraire cessé, durant les mois qui ont suivi les deux décès de mai 2002, voire durant les années qui ont suivi la mort d’Abdelkader Bouziane, de se saisir de toutes les occasions de parole publique. Ces portraits (...) Lire 

autoportrait - 3 / Samir Baaloudj

Ce portrait ainsi que les trois autres qui l’accompagnent sont des itinéraires militants, dits à la première personne du singulier, à visage découvert.
Ils ne « redonnent » pas « la parole » à des gens « prives de parole ». Les quatre personnes dont il s’agit n’ont au contraire cessé, durant les mois qui ont suivi les deux décès de mai 2002, voire durant les années qui ont suivi la mort d’Abdelkader Bouziane, de se saisir de toutes les occasions de parole publique. Ces portraits (...) Lire 

autoportraits - 4 / Benamara Zeghadi

Ce portrait ainsi que les trois autres qui l’accompagnent sont des itinéraires militants, dits à la première personne du singulier, à visage découvert.
Ils ne « redonnent » pas « la parole » à des gens « prives de parole ». Les quatre personnes dont il s’agit n’ont au contraire cessé, durant les mois qui ont suivi les deux décès de mai 2002, voire durant les années qui ont suivi la mort d’Abdelkader Bouziane, de se saisir de toutes les occasions de parole publique. Ces portraits (...) Lire 

L’outrage à personne dépositaire de l’autorité publique

par

A Dammarie-lès-Lys, l’incrimination pour « outrage à personne dépositaire de l’autorité publique » fait partie de l’expérience ordinaire. Fondée sur la seule parole des policiers, elle témoigne d’une forme d’exercice du pouvoir comparable à celle qui prévaut en prison : une présomption de rébellion, une proximité quotidienne, un traitement disciplinaire - mais à ciel ouvert.
Une incrimination a cristallisé l’attention publique à Dammarie-lès-Lys, celle de l’outrage, parfois couplée à (...) Lire 

Les suites judiciaires de la mort d’Abdelkader Bouziane

par

Dammarie, lieu de mémoire. Celle, cuisante, des non-lieux (affaire Bouziane). Celle, méfiante, de la désinformation, d’où l’enjeu de l’image (collectif POIS). Celle du deuil, familière jusqu’au rituel (Xavier Dem, un enterrement politique).
Le 17 décembre 1997, peu après 23 heures, Abdelkader Bouziane (16 ans) part au volant de la Volkswagen Golf blanche de sa mère, de Dammarie-lès-Lys vers Nemours, accompagné de son cousin Djamel Bouchareb (19 ans). Ils sont très vite pris en chasse (...) Lire 

un enterrement politique

par

Dammarie, lieu de mémoire. Celle, cuisante, des non-lieux (affaire Bouziane). Celle, méfiante, de la désinformation, d’où l’enjeu de l’image (collectif POIS). Celle du deuil, familière jusqu’au rituel (Xavier Dem, un enterrement politique).
Une dizaine de jours après sa mort, Xavier Dem était enterré dans le petit cimetière de Vosves, un hameau rattaché à la commune de Dammarie-lès-Lys. Quelques jours plus tôt, la famille avait fait déposer des tracts au local de Bouge qui Bouge : « (...) Lire 

images

par ,

Dès la manifestation du 27 mai, une autre lutte est menée à l’intérieur de la lutte. Un combat de tous les instants s’engage autour de la production et de la diffusion des discours et de l’image, photographique ou télévisuelle, combat qui prend à Dammarie-lès-Lys la forme de l’appropriation du moyen de lutte des détenteurs de la parole autorisée, qu’elle soit texte ou image : le droit. L’article 9 du Code civil est sans cesse convoqué, qui précise qu’une association est une personne (...) Lire 

Dammarie-lès-Lys : chronologie 2002-2003

par

Mardi 21 mai 2002 peu avant midi, de vifs échanges se font entendre dans un pavillon de Dammarie-lès-Lys, non loin de la barre d’immeuble du Bas-Moulin. Très agité, Xavier Dem, 23 ans, s’est rendu chez son grand-père et s’est emparé de sa carabine à plombs. Les voisins, alertés par les cris, à moins que ce ne soit le grand-père lui-même, appellent le commissariat, qui envoie deux agents. A leur arrivée, l’un d’eux reçoit une décharge de plombs dans le coude. Son collègue fait immédiatement (...) Lire 

Arsenal

Processus

Chroniques

Un ermite frivole

par

Où son âme présente un défaut cardinal  : il avoue à demi-mot mal se porter lorsque en réalité il ne ressent rien – que ce soit envers son travail, ceux qui l’entourent, ou s’il constate la vacance de ces désirs qui d’ordinaire le taraudent (ceux-là, en grande part, sont très hauts). Au lieu d’admettre la platitude de cette neutralité atroce – de cette désactivation intérieure dont n’importe quel être souffre de façon récurrente – il fait ses allusions avec une voix basse qui laisse (...) Lire 

Une sérénade

par

Pour des raisons de mise en page, cette contribution est uniquement disponible en pdf. Lire 

bernique, journal d’une anosmie

par

En novembre 1998, Jean-Pierre Guillard a reçu un coup sur la tête. Il en a perdu le goût et l’odorat.
troisième semaine
J’ai le sentiment de me plier à la cérémonie de la tisane depuis une éternité.
Ça fait trois semaines que l’odorat a disparu. Et trois semaines que, chaque jour, Elia m’apporte le gros bol du remède fumant qu’elle a dégoté chez un marchand d’anxiété alimentaire.
Je m’y plie, je m’y replie et ainsi de suite jusqu’à disparaître dans mon sans goût brûlant. (...) Lire 

paris, 15 août

par

L’audace impudente, la fraude et la médiocrité règneront toujours, c’est leur sort de revenir sur l’eau.
Les rues les moins fréquentées des grandes villes seront éclairées la nuit mieux qu’elles ne sont en ce moment, et elles seront tout aussi sûres. Parfois les principales rues des petites villes jouiront des mêmes avantages. Telles sont les douceurs et la bienheureuse destinée que le ciel réserve à la génération qui s’élève. Heureux ceux que, au moment où j’écris, la sage-femme reçoit (...) Lire 

une désaffection pour la chose sportive

par

Régurgiter par associations Délier une histoire Que tel vide amène à tel plein Libéré du convaincre énumérer les indices Il y a des montagnes Leur cime est enneigée Boucles échantillons qui s’altèrent Pour délier les pleins La boucler pour qu’elles s’ouvrent, suggèrent la proximité d’une mer Arracher un épaulé jeté L’haltérophile soulève de la fonte Comme neige au soleil
Jamais je n’aurai mis aussi longtemps pour écrire cette chronique. Il est difficile et fort ennuyeux d’exprimer sa (...) Lire 

Rébus

par

western love

par

J’ai apprécié ton plat de haricots. C’était grand comme dix amarantes. Tu as aussi acheté des couvertures à la mode pour nous protéger des cris du coyote dans la nuit. Je t’appelais mon petit coussin isolant.
La prairie s’étend à perte de vue au fil de notre errance. Tu as fait un feu pour sécher nos chaussettes. Dans la nuit les bêtes reconnaissantes clignaient des yeux vers les ombres. Les collines se délitaient.
Ton instinct de cheval t’a préservé des concessions minières. Tu as (...) Lire 

l’épeire / plus qu’une enveloppe vide

par

Le cadre de la fenêtre a disparu. Son ombre a filé plus loin, en contrebas de la colline — la vue est grand ouverte et il ne me reste qu’un seul vœu, faire ce que je ne sais pas. Sur le figuier, contre le mur, une épeire allonge ses pattes avec lenteur. Elle évalue un vide puis s’élance, sans tomber. J’étais surprise — vous aussi sans doute, la surprise vous atteint de cette façon. Elle tire le lacet qui maintient ensemble les sourcils au-dessus des yeux. Une fois faite, l’ouverture se (...) Lire 

si possible dormir en blanc

par

Du balcon, maintenant, on a la perspective des femmes, dans la trouée. Les animaux sont accumulés, lavés. Ils font passer les animaux ; il y a une chaîne, des répliques. Ceux qui viennent de dehors restent sur le côté. Après la fête, pieds nus, on traverse le long du sable, l’enfilade des voitures. Plus tard, on lavera les vitres et le sol de l’autel. Une tête cachée par une sorte de paille, recouvre le visage. La zone est composée de maisons basses, il y a des couleurs ; certains (...) Lire 

mettons

par

mettons
Mettons que je ne sais plus pourquoi je vis ici, puisque j’écris sur Vienne - ou plutôt, quand j’écris, je suis à Vienne. Et mettons qu’ici je ne bois ni café au lait, ni grand crème, ni Kapuziner, mais un capuccino, et les loyers sont chers, mais on mange pour beaucoup moins, et soudain tous les amis s’appellent Giulio ou Giorgio ou Luciano, Ginevra, Marina, Alda. Mettons qu’on rêve déjà dans une autre langue, mais il paraît que ça ne veut rien dire : il faut savoir compter dans (...) Lire 

« aux grèves des mineurs »

par

Photographies et textes extraits d’un monument réalisé par Anne-Françoise Brillot [Agence Paysage(s)] pour La Maison de l’Art et de la Communication, à Sallaumines dans le Nord-Pas- de-Calais. Panneau en acier brut de deux mètres de hauteur, sur chaque face sont installés 35 carreaux de faïence blancs imprimés avec des paysages. Traces physiques de ces histoires englouties sous terre. Morceaux choisis d’entretiens avec d’anciens mineurs sur leurs souvenirs de grèves.
« Mon père mineur, (...) Lire 

deux récits

par

les abîmes
psychée
À tout lieu de vie correspond un plan, sont attribués des points cardinaux. Tout est si souvent vu d’en haut, en trois dimensions sur un écran ou retranscrit en signes conventionnels sur le papier. On se tient au bord de la carte géographique, on connaît la source des fleuves et l’endroit où ils se jettent. Derrière soi, on aura l’Inde, devant, la Laponie. La Lapone, puis la Finnoise — n’est-ce pas ici que la Reine des Neiges a emmené le garçon gelé ? Une ville (...) Lire 

Un lieu

La Fensch, une vallée au singulier

une vallée au singulier

retours

par

un documentaire à la première personne sur une l’agonie d’une vallée industrielle Lire 

Vacarme 21

Vacarme 21 / automne 2002

Rédaction en chef la revue Vacarme

Parution le 14 octobre 2002 Édition Vacarme

Pages 120 ISBN 9782915547924

Diffusion en librairies Difpop

Diffusion numérique Cairn