Vacarme 08 / chroniques

un menu pour savoir bien en finir

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Pour inaugurer l’année, vous aviez donné une splendide fête car tout allait pour le mieux et qu’il faut jouir sans différer de ces moments-là, sachant bien qu’on ne peut trop compter qu’ils durent toujours. Bien vous en prit, car depuis lors la belle histoire d’amour qui, entre autres, nourrissait votre bonne humeur, a tourné à la manière d’une mayonnaise sournoise qui monte et monte encore, bien fermement, et attend l’ultime goutte d’huile que vous lui ajoutez afin d’atteindre sa plénitude pour s’effondrer lamentablement au fond du bol de vos espérances. Vous avez alors beau touiller, vite ou lentement, mettre un peu d’eau ou tenter d’ajouter un trait de vinaigre, vous savez, vous, que rien ne restaure les émulsions perdues, et de putativement pacsée, vous vous retrouvez positivement plaquée. Votre désormais ex, apparemment peu au fait des lois de ce genre de cuisine, s’en est retourné à ses anciennes amours, pensant naïvement qu’il suffit de recoller les morceaux du plat pour retrouver le goût de la sauce. Vous savez pertinemment qu’il restera sur sa faim, mais qu’importe maintenant ! Le fait est là, vos petits plats à vous n’ont pas réussi à le retenir, et il serait aussi vain qu’injuste de le suspecter rétrospectivement de manquer de goût. Aussi, comme avec vous tout commence et tout se finit par un dîner, vous saurez, héroïque, vous abstenir de lui servir une soupe à la grimace, et consommer le divorce avec le panache culinaire qui fait votre réputation. Du sinistre moment où un couple qui rompt doit bien procéder au partage des petites cuillères de leur vie commune, ayez l’orgueil de faire un ultime grand dîner, digne des noces qui n’ont pas eu le temps d’avoir lieu. Faites donc léger et pétillant. Servez pour mise en bouche un flan de courgettes au coulis de tomates fraîches, poursuivez d’une papillote de daurade et sa julienne, aboutissez à une poularde au champagne, et mettez un point final à toute cette histoire par un mœlleux de chocolat tiède et sa crème au café. Un bon champagne s’impose d’un bout à l’autre du dîner. Après quoi, mettez gentiment l’ex à la porte, laissez vaisselle et autre nettoyage pour le lendemain, faites-vous belle et sortez goûter votre nouvelle liberté.

Flan de courgettes au coulis de tomates fraîches

4 courgettes pas trop grosses, 5 tomates moyennes, 1/2 poivron rouge, 1 gousse d’ail, du basilic frais, 2 œufs, 20 cl de crème épaisse, de l’huile d’olive, sucre, sel et poivre.

Flan : couper les courgettes en tranches fines avec la peau et les faire revenir à la poêle dans 3 à 4 cuillerées d’huile d’olive, d’abord à feu vif pour colorer une partie des tranches, puis à feu plus doux en couvrant, jusqu’à ce que les tranches soient translucides et aient perdu leur eau. Passer ensuite au presse-purée, ajouter sel, poivre et l’ail pressé. Griller le demi poivron au four pour le peler, le découper en tout petits dés (env. 3 mm) et faire revenir ces dés dans de l’huile d’olive jusqu’à ce qu’ils soient assez tendres. Battre ensemble les œufs et la crème fraîche pour obtenir un mélange légèrement mousseux, saler et poivrer légèrement, puis l’incorporer à la purée de courgettes. Corriger au besoin l’assaisonnement et incorporer enfin les dés de poivron. Verser cet appareil dans un ou des plats ramequins et cuire au bain marie (éventuellement à la cocotte-minute). La cuisson est achevée lorsque la pointe d’un couteau plantée au cœur du flan ressort « sèche » (c’est-à-dire que rien n’y adhère). Laisser refroidir, puis mettre à rafraîchir quelques heures. Démouler juste avant de servir accompagné du coulis.

Coulis : peler les tomates à la flamme ou à l’eau bouillante, les couper et les épépiner, puis les passer au presse-purée. Sucrer légèrement, saler et poivrer, puis ajouter le basilic haché ainsi qu’une pointe d’huile d’olive, mettre à rafraîchir.

Papillote de daurade et sa julienne

1 filet de daurade par personne et env. 1 carotte, 1/2 blanc de poireau et 1 branche de céleri pour 2 personnes. Un peu de thym, de vin blanc sec, de crème fraîche, sel et poivre.

Former pour chaque personne une papillote en papier d’aluminium. Émincer en julienne la carotte et le poireau, y ajouter le céleri coupé très finement. Faire de cette julienne un lit au fond de chaque papillote, saler et poivrer modérément, poser le filet de daurade, le saler et le poivrer, ajouter quelques brisures de thym, une cuillerée de crème fraîche et deux cuillerées de vin blanc, fermer la papillote et cuire à four chaud une bonne dizaine de minutes.

Poularde au champagne

1 poularde découpée en morceaux, 2 échalotes, 1 gousse d’ail, un peu de thym, un peu de farine, env. 30 cl de crème épaisse, 1 petit verre de cognac, 3/4 de bouteille de champagne, sel, poivre.

Dans une cocotte (ou une cocotte-minute), faire revenir les morceaux de poularde dans un peu de matière grasse, puis ajouter les échalotes finement hachées. Quand le tout a pris un peu de couleur (mais pas trop !), saler, poivrer et flamber avec le cognac. Saupoudrer avec un peu de farine, ajouter quelques brins de thym et la gousse d’ail, puis mouiller abondamment avec le champagne. Fermer la cocotte et cuire doucement jusqu’à ce que la viande soit bien tendre, mais ne se désosse pas (vérifier au bout d’environ 40 mn en cocotte-minute, compter env. 1h 15 à 1h 30 en cocotte traditionnelle). Sortir et réserver au chaud les morceaux. Faire réduire la sauce, et au besoin l’épaissir légèrement avec une pointe de maïzéna. Juste avant de servir, lier avec la crème fraîche et mijoter encore quelques instants sans bouillir. Rectifier l’assaisonnement, puis battre légèrement la sauce au moment de napper les morceaux de poularde. Accompagner d’une simple timbale de riz.

Mœlleux de chocolat et sa crème au café

Pour le mœlleux : 200 gr de chocolat à dessert, 40 gr de beurre, 1/2 tasse de café très fort, 30 gr de Maïzéna, 20 gr de farine, 2 œufs, une pincée de sel.

Pour la crème au café : 1/2 l de lait, 4 jaunes d’œufs, 1/2 tasse de café très fort, 10 gr de sucre.

Dans une casserole, faire fondre à feu très doux le chocolat avec le café. Lorsqu’il est entièrement ramolli, retirer du feu et tourner en incorporant le beurre en petits morceaux, puis la farine mélangée à la Maïzéna, et enfin les jaunes d’œufs. Malaxer le tout à la cuillère jusqu’à obtenir une masse bien homogène, qui tend à « faire boule ». Mettre une pincée de sel dans les blancs et les battre en neige bien ferme. Incorporer la préparation au chocolat aux blancs. Cette pâte est mousseuse et a une consistance proche de celle d’une préparation pour mousse au chocolat. La verser dans un plat à four bien beurré (environ 1 à 1,5 cm d’épaisseur de pâte) et cuire entre 15 et 20 mn à four chaud (200°). Laisser refroidir.

Faire chauffer le lait avec le sucre jusqu’à la limite du point d’ébullition. Verser progressivement dans le lait, en mélangeant vivement au fouet, les jaunes d’œufs mélangés au café. Poursuivre la cuisson à feu très doux (surtout ne pas faire bouillir !), en tournant constamment, jusqu’à ce que la crème épaississe. Une fois atteinte la consistance voulue (la crème est encore liquide, lisse, et nappe bien la cuillère), retirer immédiatement du feu et transvaser dans un bol pour laisser refroidir. Si des grumeaux sont apparus, en profiter pour passer au chinois. Servir les parts de mœlleux tiédies, avec autour la crème rafraîchie mais non glacée.